Conduite après usage (...)

Conduite après usage de stupéfiants : ? les taux, la forme, la confusion

Le délit de conduite après usage de stupéfiants, aux termes de l’article L. 235-1 du code de la route n’enferme pas l’existence du fait punissable dans les frontières d’un taux à partir duquel une emprise serait caractérisée, mais simplement, alors qu’il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire qu’elle a fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants, dans les conclusions d’un acte technique faisant preuve de cet usage.

Par Maître Xavier Morin, Docteur en Droit, Avocat au Barreau de Paris

Seuil de détection versus seuil de répression
Bien entendu, le débat s’est noué autour de la question de savoir à partir de quelles conclusions expertales il serait possible au juge de dire si, oui ou non, la preuve de l’usage avant la conduite était rapportée. Deux écoles s’affrontent, l’une impliquant qu’avec l’appui du rapport d’expert, lorsqu’il existe au dossier, la juridiction peut relever tout élément de l’analyse pour dire la preuve de l’usage rapportée, l’autre, que les résultats probants doivent répondre à une définition complémentaire dont le contenu est établi par le pouvoir réglementaire qui vient ainsi au secours d’un texte de loi considéré d’ailleurs comme constitutionnel à cette condition seulement.
Ainsi, l’arrêté du 13 décembre 2016 fixant les modalités du dépistage des substances témoignant de l’usage de stupéfiants est-il venu fixer un seuil de détection des substances selon les modalités de la mesure. La volonté répressive ayant cependant la vie dure, certaines juridictions ont continué d’affirmer que ce seuil de détection n’était pas seuil de répression et que toute mesure pouvait donc, même inférieure, faire preuve de l’usage, sans que l’on en sache la raison par ailleurs.
Cette façon de voir, en contradiction manifeste avec les affirmations du Conseil Constitutionnel qui mettait en avant, dès 2011, la notion de seuil faisant preuve de l’usage, a fait basculer très tôt le contentieux sur la demande de contre analyse prévue à l’article R235-11 code de la route.

N’importe quel taux, n’importe quelle mesure, faisant apparaître n’importe quoi, pouvant entrainer la condamnation, les prévenus sollicitaient fréquemment, après conseil, qu’une autre analyse soit ordonnée. Dans la rédaction initiale du texte réglementaire, il était possible de solliciter la contre analyse sans qu’aucun délai ne soit opposé. Dès lors, nombre d’affaires échouaient dans les sables du temps et les échantillons sanguins détruits, perdus, inexploitables, offraient une issue inespérée aux dossiers les plus compromis.

Le 26 décembre 2016, la conscience de cette brèche ayant fait son chemin, un décret opportun a vu le jour et la demande de contre analyse a été enfermée dans le même délai que celui prévu pour la procédure de conduite sous l’empire d’un état alcoolique, soit 5 jours à compter de la notification des taux de la première analyse.

Cependant, pour les procédures de conduite après usage de stupéfiants, il faut, le jour même du contrôle, que le mis en cause soit informé de son droit à contre analyse afin que, s’il souhaite se réserver possibilité de la solliciter après notification des taux, un prélèvement sanguin soit effectué à cette fin. Pour manier tous ces paramètres, le mis en cause devra être fort lucide, et la question de son état au moment de son interpellation risque de se poser. Faudra-t-il différer la notification des droits ? Et sur quel fondement ?

Photo de Une : Me Morin

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