Violation de la clause

Violation de la clause de non concurrence : à quoi s’expose le salarié ?

Un contrat de travail peut prévoir que, dans l’hypothèse où le salarié serait amené à quitter l’entreprise, il ne pourrait alors pas exercer une activité professionnelle concurrente.

Par Timothée Henry, Avocat Associé Cabinet Capstan Sophia Antipolis, Spécialiste en Droit du travail

La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser en 2002 qu’une telle obligation de non- concurrence n’était licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps, limitée dans l’espace, tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte pour l’employeur l’obligation de verser à celui-ci une contrepartie financière (Cass. Soc., 10 juillet 2002, n° 99-43334).

Si ces conditions cumulatives sont aujourd’hui généralement bien "assimilées" par les deux parties, il s’avère qu’elles ne sont toutefois pas toujours conscientes des sanctions auxquelles elles s’exposent en cas de violation de cette clause, notamment le salarié.
Pourtant, ces risques peuvent être potentiellement conséquents.
Le salarié perd tout d’abord le droit à l’indemnité compensatrice prévue en contrepartie du respect de l’obligation de non-concurrence. L’employeur peut effectivement ne pas la payer dans la mesure où la clause devient alors sans objet et ce, même si le contrat de travail ne le prévoit pas expressément.

Si l’employeur a déjà versé tout ou partie de la contrepartie financière, le salarié peut être condamné à restituer la somme indûment perçue à compter de la date de violation de la clause de non-concurrence.

Lorsque cette clause est assortie d’une "clause pénale", consistant à fixer à l’avance le montant des dommages et intérêts qui seront dus par celui qui n’exécutera pas son obligation, le salarié peut être condamné à les verser à l’employeur.

Il s’agit d’une somme forfaitaire devant donc être versée même si elle est supérieure au préjudice réellement subi du fait de la violation de l’obligation de non-concurrence (sous réserve cependant d’une possible modulation par le juge). En principe, cette clause pénale est applicable sans que l’employeur n’ait même à établir l’existence d’un préjudice.

Enfin, le paiement de cette pénalité n’empêche pas l’employeur de demander, en outre, des dommages et intérêts complémentaires en réparation du préjudice subi (financier, commercial, moral…), si cette réparation spécifique est prévue dans la clause de non-concurrence (Cass. Soc., 27 novembre 2013, n° 12-20537).

Toutefois, encore faut-il alors démontrer la réalité et l’importance de ce préjudice en établissant non seulement la baisse du chiffre d’affaires (ou de la marge) de l’entreprise mais également et surtout, en mettant en évidence que cette baisse est directement – et exclusivement – consécutive à la méconnaissance par le salarié de la clause de non-concurrence qu’il avait acceptée.

Certes, la charge de la preuve pèse sur l’employeur et les juges, évaluant souverainement le préjudice invoqué, et demeurant très exigeants en la matière.

Il n’en demeure pas moins que le principe de la "réparation intégrale" est posé et que l’addition, pour le salarié, du remboursement de la contrepartie financière indûment perçue, de la pénalité contractuellement convenue et des dommages et intérêts complémentaires peut s’avérer non négligeable, au
regard notamment des moyens dont il peut disposer.

Il convient d’avoir conscience des difficultés susceptibles de survenir sur ce point à l’issue de la relation contractuelle et donc, pour le salarié, de ne pas s’engager à la légère au moment de la conclusion d’un nouveau contrat de travail.

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