L'intérêt du témoignage (...)

L’intérêt du témoignage de Partie Civile

Me Ollié ©S.G

Par Me Benjamin Ollié

Maître Benjamin OLLIE a prêté serment le 14 janvier 2020. Il exerce au barreau de Nice. Son cabinet est situé au 6 Place des Cigalusa à NICE.
Représentant Jeune Barreau UJA NICE.
Me Ollié est l’un des plus jeunes avocats à participer au procès. Il représente une trentaine de parties civiles. Il s’exprimera sur le procès, dans les colonnes de notre journal, au cours des prochaines semaines.

La troisième semaine du procès de l’attentat du 14 juillet 2016 a ouvert la période des témoignages de parties civiles. Pendant les semaines à venir vont se succéder les prises de paroles de ces personnes meurtries par les événements dramatiques survenus sur la Promenade des Anglais ce soir de fête nationale, 6 ans auparavant.

Pourtant, le procès pénal est avant tout celui des accusés, celui des prévenus. Sa raison première est de statuer sur la responsabilité pénale des personnes objets des poursuites. Partant, l’observateur extérieur pourrait s’interroger sur l’intérêt de ces vagues de témoignages.

Il est vrai que les récits des victimes, directes ou indirectes, ont pour leur grande majorité fait l’objet d’une retranscription en procédure. Il n’existe pas de besoin au sens du dossier pénal de recueillir à la barre du tribunal ces témoignages.

En ce sens, il serait tentant d’affirmer que ces interventions n’éclairent en rien la Cour et qu’elles n’ont pour seule conséquence que de rallonger des débats déjà bien nourris. Ce serait pourtant une erreur à plus d’un égard.

- D’une part, les interventions des parties civiles permettent d’incarner le dossier. Le témoignage de la victime à la barre permet de donner vie à une procédure longue de plus de 9 400 cotes. Si l’information se dégage des procès-verbaux d’audition, c’est véritablement la prise de parole de chaque intervenant qui permet d’extraire l’essence des expériences traumatiques vécues.

Cette humanisation du dossier permet à mon sens aux juges de s’imprégner de son contexte, au-delà des seuls faits matériels dénoncés. Si le magistrat était convaincu de la souffrance des victimes, il en est maintenant également persuadé.

- D’autre part, à l’heure du développement et de la place sans cesse plus grande accordée à la justice restaurative, il serait réducteur de cantonner le procès pénal à sa fonction première.

C’est ainsi qu’au-delà de l’atteinte à la valeur sociale protégée à réparer le nouveau procès pénal veut reconstruire l’individu meurtri. Les parties civiles qui témoignent s’emparent de l’occasion pour entreprendre, poursuivre ou achever leur rétablissement et faire de cette instance la leur.

Un procès de l’ampleur de celui-ci ne saurait donc se dispenser de prêter une oreille attentive et empathique à ces témoignages poignants.

Photo de Une : des parties civiles avancent vers la salle de retransmission du procès de l’attentat de Nice (au Palais Acropolis). ©S.G

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