Social : Panorama - (...)

Social : Panorama - encourageant - de jurisprudence en matière de CDD

Le contrat de travail à durée déterminée (CDD), contrat dit "précaire" pour le salarié, pouvait être qualifié de "périlleux" pour l’employeur.

Par Me Agnès BALLEREAU-BOYER, Avocat associé – Barreau de Grasse Capstan Avocat

Les contestations judiciaires se rattachant à sa conclusion et à son exécution se révélaient être onéreuses pour l’employeur pour une durée d’emploi somme toute limitée. En effet, le CDD qui n‘était pas remis dans les 2 jours de l’embauche, le délai de carence qui n’était pas nécessairement observé stricto sensu entre plusieurs CDD ou encore les innombrables mentions obligatoires légales à faire figurer au contrat, que la jurisprudence n’avait pas manqué d’accentuer par ailleurs, ont donné des sueurs froides à certains.
Aussi, les cas de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée se sont multipliés à l’envi.

Et pourtant, il semblerait que l’ère de la modération soit arrivée.


Ainsi, l’ordonnance "Macron" n° 2017-1387 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail inscrit à l’article L.1245-1 du Code du travail le fait que la méconnaissance de la transmission du CDD dans les 2 jours ouvrables de l’embauche n’entraîne plus la requalification dudit contrat en CDI mais ouvre "simplement" droit au bénéfice d’une indemnité ne pouvant excéder un mois de salaire. Rappelons que précédemment, la requalification en CDI entraînait le versement au salarié de dommages et intérêts, outre les indemnités de rupture, à savoir l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents ainsi que l’indemnité de licenciement le cas échéant.

La Chambre Sociale de la Cour de cassation a également, en fin d’année 2017, quelque peu infléchi sa jurisprudence en la matière.

Ainsi, au terme d’un arrêt en date du 21 septembre 2017, a été jugé contrairement à la position jusque-là adoptée que l’absence ou le caractère erroné dans le contrat de travail à durée déterminée d’usage de la désignation du poste de travail n’entraînait plus la requalification en contrat à durée indéterminée, sous la réserve toutefois de la démonstration que l’emploi occupé est bien par nature temporaire. (Cass. soc. 21 septembre 2017, n° 16-17.241).

Puis c’est la question de la prescription de l’action en requalification du CDD en CDI qui a intéressé la Chambre Sociale qui, pour la première fois, admet que la durée de la prescription puisse être aménagée contractuellement et, en pratique - et en réalité -, que le délai de prescription puisse être réduit au moyen d’une clause contenue dans le contrat de travail et ce, pour sécuriser cette relation contractuelle et limiter les recours. (Cass. soc. 22 novembre 2017, n° 16-16.561).

Le 20 décembre 2017, la Chambre Sociale adoptait un raisonnement littéral en considérant que le défaut de la date de la conclusion d’un CDD n’emportait pas requalification en CDI dans la mesure où la date de conclusion n’est pas une mention obligatoire imposée par la loi et précisément par l’article L.1242-12 du Code du travail.
Et ce, en dépit de l’argumentation de la salariée qui défendait que le défaut de la mention de la date de conclusion ne permettait pas de s’assurer de la transmission régulière du CDD et donc du respect de la légalité en la matière (Cass. soc. 20 décembre 2017, n° 16-25.251). Ce début d’année 2018 confirme la tendance amorcée.

Ainsi, depuis le 14 février 2018 (Cass. soc, 14 février 2018, n°16-17.966), la Cour de cassation considère que la succession de CDD dits de remplacement conclus avec un même salarié pour pallier les absences dans l’entreprise n’est pas illégale et ne caractérise pas un recours systématique au CDD pour faire face à un besoin structurel de main-d’œuvre (notion initiée par la même Chambre Sociale au terme d’un arrêt du 26 janvier 2005 - n°02-45.342), besoin qui lui-même démontrerait qu’il s’agit en réalité de pourvoir un emploi durable lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise, limite posée par l’article L1242-1 du Code du travail.

La Cour de Cassation qui évoque dans cette décision le fait que l’employeur est tenu de garantir au salarié le bénéfice des droits à congés que la loi lui accorde traduit sa volonté d’être en cohérence avec la jurisprudence européenne qui relève que le remplacement temporaire de salariés, certes au cas d’espèce dans une administration disposant d’un effectif important, est susceptible de constituer une raison objective justifiant d’une part le recours au contrat à durée déterminée et d’autre part le renouvellement de ces contrats selon les besoins (CJUE, 26 janvier 2012, aff. C - 586/10, 2ème ch.).

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