Maître Caspar : "les (...)

Maître Caspar : "les Notaires se trouvent au cœur de la vie territoriale"

Pour leur congrès de Cannes qui se tient jusqu’au 30 mai, les Notaires réfléchissent sur l’avenir de la ville, de l’agriculture, de la forêt et de la fiscalité liée à ces thèmes. Des questions qui conditionnent le monde de demain. Maître Jeanne Caspar Chargée de la communication régionale du 114ème Congrès a répondu à nos questions.

Pourquoi avoir choisi "Demain le territoire" comme thème de ce 114ème congrès des Notaires ?

C’est un sujet important pour notre profession puisque nous nous trouvons au centre même du fonctionnement territorial. Nous avons l’occasion de prendre la mesure des dispositifs qui fonctionnent et de ceux qui ne sont pas ou peu satisfaisants.

Comment cela ?

Nous sommes au cœur de ce qui se passe dans le pays, donc bien placés pour rendre compte des difficultés qui peuvent survenir à nos concitoyens à tous les moments de la vie. Par exemple, les Notaires des zones rurales sont en première ligne avec les agriculteurs quand il s’agit d’étudier la façon dont ils détiennent et exploitent leurs terres. Même chose pour certains d’entre-nous lorsque les clients nous consultent pour la mise en place d’éoliennes, de panneaux solaires. En zone urbaine, les problématiques sont différentes, mais le rôle du Notaire reste essentiel : la désertification des centres-villes, les nouvelles façons de vivre et de travailler avec le coworking ou le coliving, les règles d’urbanisme toujours plus contraignantes, l’exploitation du moindre centimètre carré...

À Cannes, vous allez nourrir vos réflexions de ces sujets ?

Oui, car ces questions sont universelles et interrogent la profession : comment utilise-t-on nos terres ? Dans quel état allons-nous les laisser à nos enfants ? Avec nos clients, nous dépassons souvent notre seule qualité de Notaire pour faire parler le citoyen et trouver les justes équilibres entre les besoins et les moyens à mettre en œuvre.

En définissant une nouvelle organisation du territoire, la loi NoTRE impacte t-elle votre exercice ?

Le droit public n’est pas au cœur de ce congrès. Mais, bien entendu, beaucoup de points dans nos réflexions intéressent les pouvoirs publics et les collectivités locales, c’est une évidence. Le Conseil Supérieur du Notariat a d’ailleurs conclu un partenariat avec l’Association des Maires de France. Seront extraits de notre rapport des outils utiles aux décideurs locaux. Le maillage territorial est donc important et nous y sommes attachés. Les Notaires sont partout sur le territoire, même dans les zones rurales, où ils constituent bien souvent le seul point de contact juridique pour la population. Ce thème du "territoire" a du sens, il recouvre des préoccupations diverses en fonction des réalités différentes de nos exercices.

Les nouvelles lois ouvrent-elles de nouveaux "marchés" au Notariat ?

Nous avons de nouveaux domaines, comme le divorce sans juge par exemple. Des lois comme celles de la "modernisation de l’économie" ou autres révolutionnent le fonctionnement de la profession et modifient les rapports que nous entretenons avec nos clients. Ces évolutions récentes nous ont permis de nous rendre compte que nous ne sommes pas que des Notaires, mais aussi des chefs d’entreprise et que l’on doit agir comme tel. Cela a provoqué une remise en question et c’est, je crois, positif. Du coup, nous essayons de développer d’autres activités. Ici, dans les Alpes-Maritimes, le président de la Chambre des Notaires, Maître Jean-Philippe Vouillon, a par exemple souhaité que la profession mette en avant la négociation immobilière. C’est un domaine que nous maîtrisons bien, où nous sommes parfaitement légitimes.

Quid des installations de nouveaux confrères ?

De nouveaux confrères se sont installés et passent déjà des actes. Nous essayons de les intégrer au mieux, même si parfois cette situation peut être difficile à admettre pour les gens déjà installés de longue date. Nous pensons que le mode de sélection - le tirage au sort - est très discutable. Et on a aussi enregistré des dérives puisque les installations n’ont pas seulement concerné de jeunes Notaires mais également des professionnels qui ont déjà des études en place. On leur a donné cette possibilité, ils l’ont saisie, dont acte...

Est-ce que cela bouscule les équilibres économiques entre les Études ?

C’est certain. Mais c’est exactement ce qui a été voulu par la loi ! Il faut donc intégrer les nouveaux venus de façon intelligente. Cela crée en ce moment beaucoup de mouvements, également parmi les collaborateurs.
Et pour un nouveau venu, partir de zéro...
C’est dur forcément, il y a tout une organisation à mettre en place. C’est un défi. Mais il n’y a rien de nouveau, puisqu’à l’époque, lorsque les Études étaient encore créées au concours, ce n’était pas plus simple.

Des jeunes, des femmes : la profession évolue vite

Elle ne correspond pas à l’image traditionnelle que l’on a d’elle. Dans les faits, oui, il y a de plus en plus de jeunes et de femmes. Nous nous adaptons très bien au modernisme : on signe des actes électroniques à distance, on fait de la visioconférence, des actes dématérialisés... Nous vivons avec notre temps, même si l’on a besoin des aînés pour transmettre expérience et savoir.

Le numérique, un danger ?

On sera tous un jour concerné par l’intelligence artificielle le Notariat l’anticipe déjà. Notre grande force, c’est la proximité avec les gens, et malgré la dématérialisation et l’ubérisation, la clientèle aura toujours besoin d’un vrai contact avec le Notaire.

Propos recueillis par
Jean-Michel CHEVALIER

Photo de Une : Maître Jeanne Caspar en charge de la communication régionale du 114ème Congrès à Cannes. (DR et courtesy Congrès des Notaires 2018)

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