Discours de Mme Fabienne

Discours de Mme Fabienne ATZORI, Procureur de la République lors de l’audience solennelle de rentrée du TGI de Grasse

Ce lundi 23 janvier s’est tenue au Tribunal de Grande Instance de Grasse la traditionnelle audience solennelle de rentrée. Lors de cette audience Madame Fabienne ATZORI a été installée procureur de la République. Elle succède à Georges Gutierrez parti à la Cour d’Appel de Montpellier fin 2016. Vous trouverez ci-dessous le discours de Madame Le Procureur.

AUDIENCE SOLENNELLE DU TGI DE GRASSE

Discours de Mme Fabienne ATZORI

Procureur de la République
23 janvier 2017

"Monsieur le Sous-préfet de Grasse représentant M. le Préfet
Monsieur le Député des Alpes Maritimes
Monsieur le Sénateur des Alpes Maritimes
Monsieur le Maire de Grasse
Mesdames et messieurs les élus
Madame le Premier Président de la cour d’Appel d’Aix en Provence,
Je vous remercie du temps que vous m’avez consacré
Monsieur le Procureur Général,je vous ai rencontré récemment et vous m’avez décrit ce Parquet comme un Parquet où le rythme est soutenu, les procédures intéressantes et l’équipe structurée
Madame la Première président de la Cour d’appel de Monaco
Monsieur le représentant du Tribunal Administratif de Nice
Monsieur le Directeur des services judiciaire de Monaco
Chers collègues président du tribunal de première instance de Monaco et président du TGI de Nice
Cher collègue procureur de la République de Nice,
Monsieur le Bâtonnier ,
Mesdames et Messieurs les chefs de service

A vous tous et aux représentants des autorités civiles, militaires et religieuses qui nous accompagnent aujourd’hui , votre présence témoigne de l’intérêt certain que vous manifestez à la juridiction de Grasse, je n’ai pas pu vous rencontrer mais Madame TIERCELIN, dont tous décrivent le sens de l’organisation m’a préparé un programme soutenu qui devrait me permettre de réparer rapidement cette situation,
Je vous remercie Monsieur le Président pour vos mots qui vont au-delà de mots de bienvenue
Nos premiers contacts ont été riches et francs et vous avez déjà démontré l’attachement que vous portez à cette juridiction mais aussi le soin, l’attention que vous manifestez à son bon fonctionnement et aux relations avec les magistrats du Parquet,
J’ai déjà eu l’occasion de vous remercier ainsi que Mesdames et Messieurs les Premiers Vice Présidents et Vice Présidents de votre accueil, c’est publiquement et d’emblée que je tiens à nouveau à le faire
Ces premiers contacts augurent d’échanges riches et francs dont je me réjouis
Cette bonne collaboration ne pourrait pas être effective sans intégrer dans nos réflexions et nos projets Madame la directrice de Greffe et ses adjoints que je veux assurer ici , comme l’ensemble des fonctionnaires, de ma totale disponibilité et de mon écoute certaine,
Vous comprendrez néanmoins qu’au moment où je prends la parole, mes mots iront vers ceux qui m’ont fait l’honneur d’être présents aujourd’hui et dont la présence me laisse croire que je n’ai pas été finalement une si mauvaise collègue et envers mes collègues du parquet de Grasse

C’est donc bien volontiers que je remercie vivement Monsieur DI GUARDIA, mon dernier procureur de la République à Marseille, de sa présence, il sait et je le répète volontiers aujourd’hui que nos liens de parquetier sont aussi des liens d’amitié indéfectibles, le terme même de « mon » procureur témoigne de l’image qu’il m’a laissée et je ne suis pas seule ici à avoir travaillé sous son autorité et en avoir gardé un souvenir exceptionnel. Malgré la lourdeur de la tâche qui était la sienne, son écoute, ses conseils , nombreux, ont été précieux et sans doute l’image que vous m’avez renvoyée n’est pas étrangère au goût si prononcé que je nourris pour les fonctions du Parquet,
Merci à ceux qui encore m’accompagnent, qu’ils viennent de Lille ou de Marseille et dont la présence m’est précieuse, ils incarnent mes années lilloises faites de découvertes d’une région si attachante et de liens là aussi chaleureux que le climat peut être froid
Enfin je salue la présence des lyonnais, j’allais dire du gang des lyonnais, qui m’ont fait le plaisir d’être aussi présents alors que je connais pour avoir exercé jusqu’à très récemment mes fonctions de président de la chambre de l’instruction de Lyon la charge qui est la leur. Leur présence n’a, peut-être, d’autre objet que de s’assurer que je ne reculerai pas devant l’obstacle et que je ne ferai pas défection, ils savent combien les nouvelles fonctions dans lesquelles je suis installée aujourd’hui me sont chères mais aussi les doutes, les questionnements qui sont les miens, ce sont des fonctions délicates qui me sont confiées et qui doivent inciter à la modestie et à l’humilité,

Mais même si l’exercice n’est pas facile, c’est avec fierté que je prends la parole aujourd’hui et rejoins une nouvelle fois le Parquet,

Je sais que le travail entrepris par M GUTTIEREZ a été de grande qualité. Les éléments dont je dispose déjà me conduisent à affirmer que le travail qu’il a accompli, avec toute l’équipe du Parquet, magistrats et fonctionnaires, durant la période écoulée ,me permet de prendre mes fonctions dans des conditions optimales et de m’inscrire dans la dynamique qu’il avait su créer ,
Si être procureur de la République c’est décider, c’est choisir, c’est aussi décider et choisir en connaissance de cause, autrement dit observer, écouter, entendre et décider.
Je sais pour avoir rencontré les membres du Parquet, que tous sont animés d’un grand professionnalisme et d’un grand intérêt pour leurs fonctions,
J’ai pu mesurer déjà que malgré la charge de travail, qui vient d’ailleurs d’être illustrée par les chiffres communiqués par Monsieur le procureur adjoint Bonifay, leur engagement au bénéfice de la juridiction est total et cet engagement fait que la situation est saine,
Je souhaite particulièrement souligner le dévouement des procureurs adjoints et plus spécialement celui de Monsieur Bonifay , qui a assuré avec efficacité l’intérim des fonctions de procureur de la République et surtout l’exercice difficile du discours de présentation du nouveau procureur de la République, en ne mentionnant pas mon âge ce dont je leur suis particulièrement reconnaissante,
Tous les magistrats du Parquet lors de nos contacts ont décrit les tâches importantes auxquelles ils devaient faire face, parfois avec difficulté en raison des vacances de poste,
A ce titre, j’ai observé que l’effectif théorique du Parquet de Grasse était de quinze magistrats, sans faire offense à l’OGC Nice qui réussit un début de saison prometteur en ligue 1, c’est l’effectif d’une équipe de rugby dont deux membres seraient à l’infirmerie depuis de nombreuses semaines, sans perspective de recrutement pour revenir à un effectif complet malgré le prêt régulier de joueurs autrement dit de magistrats placés auprès de Monsieur le Procureur Général,
Je promets d’être le pilier, on m’a dit que c’était le poste le plus important, de cette équipe de rugby en formant le vœu que notre effectif n’ait pas à souffrir d’autres blessures sévères et surtout que nous connaissions plusieurs saisons riches de victoires et de trophées, illustrés pour ce qui nous concerne non pas de victoires mais d’un travail exercé dans de bonnes conditions et dans des relations franches au sein d’une équipe dont je prendrai soin d’être la capitaine bienveillant et attentif

Vous avez présenté Monsieur BONIFAY l’activité pour l’année écoulée,
Je ne peux au moment où je prends la parole tracer ce qui sera mon action ce qui supposerait que j’ai une vision pleine de l’activité de la juridiction, ce qui serait présomptueux,
Il m’appartient cependant en me présentant devant vous d’évoquer ce qui m’est cher, ce qui compte, et j’évoquerai deux choses
décrire l’attachement qui est le mien à l’unité du corps judiciaire
- dessiner le cadre général de mon action
Mon parcours illustre l’attachement à l’unité du corps judiciaire
Vous l’avez rappelé j’ai exercé des fonctions de magistrat du Parquet et de magistrat du siège
Faut- il le rappeler le corps judiciaire comprend : / 1° Les magistrats du sie ?ge et du parquet de la Cour de cassation, des cours d’appel et des tribunaux de premie ?re instance ainsi que les magistrats du cadre de l’administration centrale du ministe ?re de la justice ; / 2° Les magistrats du sie ?ge et du parquet place ?s respectivement aupre ?s du premier pre ?sident et du procureur ge ?ne ?ral d’une cour d’appel (...) ; / 3° Les auditeurs de justice. »
Je suis au plus profond de moi convaincue et mon expérience le démontre qu’un magistrat peut exercer successivement des fonctions d’apparence aussi différente que celle de magistrat du siège et du Parquet,
Je suis tout aussi convaincue qu’un magistrat du Parquet ne peut que retirer une expérience positive d’un « passage » au siège et l’inverse me convainc tout autant
Il est essentiel d’appréhender riches de nos expériences respectives les difficultés auxquelles notre interlocuteur institutionnel peut être confronté pour mieux les comprendre
Surtout l’unité du corps judiciaire permet d’affirmer une fois de plus que les magistrats du Parquet sont des magistrats à part entière, garant des libertés individuelles, soumis à l’obligation d’impartialité et à celle de procéder à des enquêtes à charge et à décharge, obligations traditionnelles des magistrats du siège. Il me paraissait donc essentiel aujourd’hui de le rappeler, nous sommes des magistrats à part entière,
Le cadre général de mon action se résumera aujourd’hui en deux points :
- une exigence de loyauté
- une ouverture vers la cité
La loyauté sous-tend des relations claires, franches, bref loyales
Cette loyauté, je m’y engage et je l’attends
Je m’y engage d’abord vis à vis de vous Monsieur le Procureur Général, je le conçois même comme une obligation absolue vis à vis de vous
Je m’y engage aussi au sein de la juridiction, vis à vis de mes collègues du Parquet et de mes collègues magistrats du siège
Je l’attends en retour bien sûr de mes collègues, pour que nos discussions puissent être utiles, constructives, et pour qu’en cas de désaccord nous puissions débattre et favoriser la recherche d’une solution parfaitement informés du contexte et des enjeux de celle-ci,
Cette loyauté, je l’attends aussi des forces de sécurité, je sais pour avoir exercé des fonctions pénales depuis de nombreuses années, vos contraintes, vos obligations et surtout votre engagement, je sais aussi pour l’avoir évoqué avec mes collègues du Parquet que le travail que vous produisez est intense et que le département des Alpes Maritimes est décrit comme particulier, vous pouvez attendre de moi, de nous un soutien total dans l’exercice quotidien qui est le vôtre,
J’attends de vous de la clarté, de la sincérité, bref de la loyauté.
Les bonnes relations que nous entretiendrons, j’en suis sûre, passeront par des instructions claires, expliquées si nécessaire, c’est le deuxième point que je voulais évoquer aujourd’hui,
une politique pénale, pour pouvoir être clairement exposée, doit être préalablement déterminée et définie, exposée à nos collègues du siège, et à vous forces de sécurité ,
La loyauté je me l’impose aussi dans les relations avec nos partenaires au rang desquels figurent les avocats,
Monsieur le Bâtonnier, Mesdames et Messieurs les Avocats compter sur nous. Ce que nous pouvons décider au sein de la juridiction en terme d’organisation a des conséquences sur l’exercice de votre profession, vous êtes des partenaires qui assistent et représentent les justiciables, à ce titre vous devez être informés des difficultés auxquelles nous pouvons un temps être confrontés, et des projets que nous envisageons
Le dernier point que je souhaite aujourd’hui évoquer est celui de l’ouverture, la présentation de notre activité ,

L’ouverture vers la cité

Le conseil de juridiction est venu rappeler cette exigence et le texte définissant ses missions résume le sens de cette ouverture :
- D’abord en associant au sein de la juridiction, tous ces membres magistrats, fonctionnaires, pour que de la concertation soit issu un projet de juridiction. Ce projet de juridiction doit prendre compte des spécificités du ressort et déterminer des objectifs à moyen terme visant à améliorer le service rendu au justiciable et des conditions de travail, dans le respect de l’indépendance juridictionnelle. Il est présenté en tout ou partie, au sein du conseil de juridiction, aux personnes, organismes et autorités avec lesquels la juridiction est en relation.
- Le conseil de juridiction, coprésidé par le président du tribunal de grande instance et le procureur de la République, est un lieu d’échanges et de communication entre la juridiction et la cité.

L’ordre du jour est arrêté par les chefs de juridiction après avis du directeur de greffe en comité de gestion et de l’assemblée plénière des magistrats et des fonctionnaires, qui peuvent également faire des propositions d’ordre du jour.

Le conseil de juridiction se compose de magistrats et fonctionnaires de la juridiction désignés par la commission restreinte ou l’assemblée plénière en fonction de la taille de la juridiction et, en fonction de son ordre du jour, notamment :

1° De représentants de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse ;
2° De représentants locaux de l’Etat ;
3° De représentants des collectivités territoriales et de parlementaires élus du ressort ;
4° De personnes exerçant une mission de service public auprès des juridictions ;
5° De représentants des professions du droit ;
6° De représentants d’associations.

Cet organe n’exerce aucun contrôle sur l’activité juridictionnelle ou sur l’organisation de la juridiction ni n’évoque les affaires individuelles dont la juridiction est saisie.
Tout est dit : discuter, définir, présenter voire expliquer sans évocation des affaires individuelles, on touche là en effet au respect de décisions entreprises,
Cette ouverture nécessaire vers nos partenaires et même « nos usagers » n’est pas la transparence et il ne s’agit pas de se justifier,
Pour finir, Messieurs les premiers président des cours d’appel de LYON et Montpellier n’ont pu être présents mais monsieur le premier président de la cour d’appel de Montpellier , le président alors de la juridiction lilloise, m’avait lancé un défi, parler de quelque chose de personnel, je relève le défi et vous dis que je serai le boss, à l’écoute, attentif, clairvoyant j’espère.

J’ai l’honneur de requérir qu’il vous plaise, Monsieur le président, de me donner acte de mes réquisitions et dire que du tout il sera dressé procès-verbal conformément à la loi.

Photo de Une : Mme Fabienne ATZORI installée au TGI de Grasse ce lundi 23 janvier en qualité de procureur de la République - Photo JMC

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