La possible contestation

La possible contestation des honoraires de l’expert désigné par le CHSCT

A l’instar du comité d’entreprise, le CHSCT peut être amené à
faire appel à un expert agréé lorsqu’un risque grave est constaté
ou en cas de projet important modifiant les conditions de santé et
de sécurité ou les conditions de travail. Or, les frais d’expertise,
par application de la loi, sont à la charge de l’employeur.

Dans un arrêt du 15 janvier 2013 (n°11-19.640) la Chambre Sociale
de la Cour de Cassation précise que le juge peut procéder, après
expertise, à une réduction du montant des honoraires de l’expert au
vu du travail effectivement réalisé par ce dernier.
En l’espèce, si la convention d’expertise conclue fixait un tarif forfaitaire
jour/expert à 1.450 € HT, la Cour d’appel a valablement
pu réduire ce tarif à la somme de 1 100 € et le nombre de jours/
expert à 66 au lieu de 100. Il ressort de la décision attaquée (CA
Orléans, 2 mars 2011, n°10/02429) que certaines mentions du
rapport litigieux laissaient notamment entendre qu’il était provisoire
et incomplet et que plusieurs étaient « inexactes ou non vérifiées ».
La Cour d’appel avait également relevé que les recommandations
étaient « souvent très générales et sans grande portée, certaines
d’entre elles n’ayant aucun lien avec le projet soumis à consultation »,
et il y manquait « notamment des propositions constructives utilisables
par l’entreprise, beaucoup d’entre elles laissant en effet l’impression
d’une simple critique de la situation actuelle, ou d’une généralisation
de cas isolés ». Le tout aboutissait, selon les juges du fond, « à un rapport
manquant singulièrement de synthèse et de rigueur dans l’énoncé
du constat et des remèdes ».
La solution mérite pleine approbation.

Légitimité d’une contestation du prix

Alors que la Cour de cassation restreint les possibilités de contestation
de l’expertise en refusant d’opérer un contrôle d’opportunité sur la
mesure décidée par le comité ou en refusant un contrôle sur le choix
de l’expert qui permettrait de retenir le moins-disant, il est légitime que
l’employeur puisse contester le coût de la mesure entreprise.

Absence de tarif agréé et opposable

La faculté de contestation se justifie d’autant plus que les tarifs d’expertise
ne font pas l’objet de l’agrément ministériel et qu’il n’existe
pas de barème tarifaire agréé. D’ailleurs, comme le relève la Cour de
cassation, le tarif ne fait pas expressément partie des éléments pris en
considération par l’administration pour la délivrance de l’agrément
du cabinet d’expertise. Les tarifs pratiqués par l’expert ne sauraient
donc, du seul fait de la procédure d’agrément, être opposables au
juge et à l’employeur.

Caractère indifférent d’un accord préalable

Dans l’affaire en cause, l’expert arguait de l’accord préalable de
l’employeur pour soutenir que l’action en contestation du montant de
l’expertise était irrecevable. On doit approuver la Haute juridiction
d’avoir écarté cet argument. En effet, en pratique, l’employeur se voit
le plus souvent matériellement imposer la signature de ce document,
par l’expert. Ce dernier conditionne en effet le début de sa mission
à cette formalité, sans pour autant accepter d’en négocier les termes.
Or l’expertise trouvant sa place dans le cadre plus large d’un processus
consultatif, l’employeur, pour éviter tout blocage source de perte
de temps dans la mise en oeuvre de son projet, n’a d’autre choix que
d’accepter les conditions fixées unilatéralement par l’expert.

Une extension envisageable à l’expert du Comité d’entreprise  ?

A priori l’ensemble des arguments développé par la Cour de cassation
devrait pouvoir être retenu s’agissant aussi des expertises sollicitées
par le CE dont les honoraires sont mis à la charge de l’entreprise.
A une exception près cependant : si la faculté de contestation du prix
de l’expertise CHSCT est expressément ouverte par la loi (article L.
4614-13), aucun texte de cette nature n’est prévu pour l’expertise
du CE… Pour autant, il n’est pas sûr que cela
suffise à exclure une telle contestation sur le
fondement du droit commun des obligations.

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