Les notaires prêts à (...)

Les notaires prêts à mieux sécuriser les contrats de propriétés publiques

A l’occasion de leur 109ème Congrès, les notaires se sont penchés sur les propriétés publiques des collectivités locales. Plusieurs propositions ont été formulées pour accroître la sécurité juridique et la valorisation de ce patrimoine.

Les collectivités locales détiennent entre 15 et 20 % du patrimoine immobilier sans parler des importantes réserves de terrains. Par le passé, elles n’ont pas toujours géré au mieux leurs propriétés publiques. Aujourd’hui, elles doivent faire face à une double réalité : la crise économique et l’effacement financier de l’Etat endetté. « A l’heure du désengagement tous azimuts de l’Etat, il n’est plus temps de s’interroger sur la nécessaire valorisation du patrimoine des personnes publiques, qu’il dépende de leur domaine public, ou de leur domaine privé. La valorisation de ce patrimoine est indispensable », a déclaré Pierre-Jean Meyssan, président du 109ème Congrès des Notaires qui s’est tenu du 16 au 19 juin à Lyon autour du thème « Propriétés publiques : quels contrats pour quels projets ? ». Alors que dans un rapport de 2013, la Cour des comptes s’était étonnée du peu de fiabilité de leurs inventaires patrimoniaux. En formulant des propositions, le notariat a bien compris qu’il peut être une aide précieuse pour les collectivités locales à la recherche de sécurité juridique dans leurs opérations immobilières « C’est tout naturellement que le notaire, homme de contrat, est le dispensateur de la sécurité juridique ; sécurité juridique indispensable à la stabilité contractuelle voulue par les collectivités publiques et les élus », n’a pas caché Marc-Henri Louvel, rapporteur général du congrès.

Créer un répertoire de bases de données

Entre les communes, départements, régions, syndicats intercommunaux, communautés de communes, communautés d’agglomérations et les communautés urbaines, il n’est pas facile de savoir qui a telle ou telle prérogative. « La multiplication des niveaux de compétence rend difficile la lecture de la répartition des tâches entre les différentes collectivités locales : qui a la compétence sportive pour acquérir le terrain de rugby ? La commune ou l’intercommunalité ? », a confirmé le rapporteur général. C’est pourquoi la 1ère commission s’est penchée sur le processus décisionnel. Dans ce souci de sécurité juridique, elle propose de rendre obligatoire la création et l’alimentation des bases de données répertoriant les compétences transférées aux intercommunalités. Elle suggère aussi d’apporter une nouvelle exception à la prise illégale d’intérêts, sanctionnée à l’article 432-12 du Code pénal. Cette exception consisterait à autoriser les ventes et les baux des biens appartenant aux membres de l’exécutif d’une commune ou d’un EPCI (établissement public de coopération intercommunale), ou à leurs proches. Mais une condition à remplir : ces ventes et ces baux doivent intervenir dans le cadre d’une opération immobilière d’intérêt général. Pour Sarah Hollander-Vandenbossche, rapporteur de la 1ère commission, l’ajout de cette exception à la prise illégale d’intérêts vise à « faciliter la pratique des élus ». La commission préconise de déclencher le contrôle de légalité, via le préfet, d’une autorisation d’urbanisme tacite afin de renforcer la fiabilité juridique de l’opération immobilière.

Sécuriser les transferts de propriétés

Après le processus décisionnel, l’enjeu est la question des transferts de propriétés. Toujours dans un souci de sécurité juridique, la 2ème commission suggère de renforcer la procédure des biens présumés sans maître, afin de mieux garantir le propriétaire inconnu ou disparu. « Il faut qu’il y ait une procédure simplifiée mais il faut qu’il y ait une procédure, ce qui n’est pas vraiment le cas aujourd’hui », a indiqué Pierre Tarrade, rapporteur de la 2ème commission. L’idée serait de confier son ouverture et son suivi au conseil municipal. La commission pointe aussi du doigt le flou qui existe dans la cession amiable entre les personnes publiques des propriétés affectées à l’utilité publique. « Le CG3P (Code général de la propriété des personnes publiques) exige très peu de conditions pour le transfert de propriété à une collectivité publique », a expliqué Henri Maurey, président de la 2ème commission. Parmi les mesures à prendre, cette dernière souhaite imposer au cédant de donner davantage d’informations sur les qualités du bien transféré et que l’acte de cession soit publié au fichier immobilier.

Mieux reconnaître le titre d’occupation du commerçant

Mais au-delà des transferts de propriétés, l’enjeu pour une collectivité locale est de gérer et valoriser son patrimoine immobilier, sujet sur lequel s’est penchée la 3ème commission. Celle-ci veut mieux sécuriser les droits conférés au commerçant sur le domaine public. Comment ? En faisant reconnaître que le titre d’occupation délivré à un commerçant exploitant son activité en totalité sur le domaine public soit reconnu comme un élément constitutif d’un fonds de commerce, dès lors que l’existence de ce fonds est caractérisée par une clientèle propre à l’exploitant. « On ne veut pas interdire à la collectivité publique de dire stop, mais il faut que cela soit plus équilibré par rapport à ceux qui ont développé une clientèle », a résumé Bernard Delorme, rapporteur de la 3ème commission. Autre difficulté, la législation comporte plusieurs titres d’occupation du domaine public conférant un droit réel au partenaire de la collectivité locale. Pour mettre fin à cette complexité, la commission propose de contractualiser le droit des occupations du domaine public constitutives de droits réels. En clair, « essayer au maximum de regrouper les contrats existants pour en faire un seul », a indiqué sa présidente Marie-Hélène Pero Augereau-Hue.

Enfin, la 4ème commission s’est penchée sur la production et la gestion du logement social. Pour plus de mixité sociale, elle préconise des mesures législatives favorisant la création de logements intermédiaires dans des zones où le logement social est déjà fortement implanté. Dans sa seconde proposition, elle veut que soit clarifiée la qualité des biens offerts à la vente par les organismes HLM et la personne pouvant les acquérir. Car « la vente aux locataires, dite vente HLM, a fait l’objet depuis 1965 d’un empilement de lois et décrets avec des objectifs contradictoires : à l’origine l’aide du locataire dans un parcours résidentiel et aujourd’hui la volonté de faciliter l’opérateur dans sa commercialisation », a relevé Marc-Henri Louvel. La balle est désormais dans le camp du gouvernement et du législateur…

La bonne cote des notaires auprès des décideurs locaux

Pour la première fois, un directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, en l’occurrence Jean-Pierre Jouyet, s’est exprimé à un Congrès des notaires. Une intervention qui n’est pas passée inaperçue avec l’annonce des principaux résultats d’une enquête réalisée en mai dernier par ses services, auprès des décideurs locaux. Une forte majorité d’entre eux (80 %) a consulté un notaire au cours de ces dernières années. « 93 % de ces décideurs locaux sont satisfaits », a-t-il dévoilé. Et le recours à un notaire ne risque pas de s’essouffler. « 90 % des décideurs locaux envisagent de vous consulter dans leurs prochaines opérations immobilières », a conclu Jean-Pierre Jouyet, sous les applaudissements.

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