Le grave, le soudain (...)

Le grave, le soudain et la brioche

On en connaît beaucoup qui vont regretter de n’avoir pas postulé à un emploi de fonctionnaire à la Commission européenne. Encore qu’il ne soit jamais trop tard pour l’envisager, vu que l’effectif de l’Institution est celui d’une multinationale : 45.000 personnes. Mais le turn-over n’est pas très élevé, et pour cause : les traitements offerts sont (très) confortables et le statut fiscal (très) accommodant. En outre, la grille des rémunérations bénéficie d’une indexation automatique, un petit plus qui garantit l’augmentation métronomique du pouvoir d’achat des bénéficiaires. C’est cool. Selon le mécanisme d’indexation en vigueur, les traitements doivent être majorés l’année prochaine de 3.7%. Alors que les Etats-membres, contraints de raboter leurs dépenses, veulent limiter à 2.9% la hausse de leur contribution au budget communautaire. En foi de quoi avaient-ils envisagé de limiter l’indexation des salaires à la moitié du taux contractuel, compte tenu des rigueurs de la crise.

La Cour de Justice de Luxembourg vient de retoquer la lésine des 27, au motif que ces derniers « n’ont pas la marge d’appréciation » pour prendre une telle décision. En d’autres termes, la Cour estime que l’on ne peut diagnostiquer l’hémorragie que lorsque le patient s’est totalement vidé de son sang. Or, il bouge encore. Pas beaucoup, certes, mais il bouge. Car voyez-vous, les conventions salariales des fonctionnaires européens sont précises : elles prévoient que les clauses d’indexation peuvent être mises en cause en cas de « détérioration grave et soudaine de la situation économique et sociale ». Personne ne conteste que la détérioration soit grave. Mais voilà : elle n’est pas soudaine. « C’est une crise qui dure depuis des années. Selon nous, ça ne s’applique pas » affirme doctement un porte-parole de la Commission. Au moment où cette dernière enjoint les Etats d’amputer le traitement des fonctionnaires nationaux, entre autres restrictions budgétaires, cette position va lui garantir un surcroît de popularité. Car il n’est pas très bien vu de faire bouffer des briques à ses contemporains, pour pouvoir se taper toute la brioche.

La recette du jour

Brioche bruxelloise

Il vous faut du blé, du lait et des œufs. Passez le blé au moulin et le lait à la baratte. Avec le son, le petit-lait et les coquilles d’œufs, confectionnez une brique pour votre maisonnée : c’est la brioche bruxelloise, servie en cas de crise grave et soudaine. Avec la farine, le beurre et les œufs, préparez une délicieuse viennoiserie. Et dégustez-la « en Suisse ».

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