Bourse : un hiver précoce

Bourse : un hiver précoce

On souhaite aux amateurs de balades en Bourse qu’ils n’aient pas oublié de bien se couvrir : après un été pourri, les températures continuent d’y être beaucoup plus fraîches que les moyennes saisonnières. Tout particulièrement à Paris, qui se trouve au centre d’une dépression carabinée. Les experts du FMI, qui sont à la météo financière ce que le GIEC est au climat, ont récemment confirmé l’origine anthropique de cette glaciation prématurée : ce sont les banquiers européens, français et allemands, qui ont abusé des émissions souveraines. Ils ont concentré dans leurs coffres une grosse partie des emprunts gazeux émanant des pays du Sud. Et ainsi privé l’Europe entière du bienfaisant effet de serre qui d’ordinaire lui réchauffe les os et entretient une croissance satisfaisante de l’activité. Connaît-on le moyen de lutter contre l’apparition d’un nouvel âge glaciaire que pourraient entraîner ces dérèglements ? La réponse n’est pas aisée, car ni l’économie, ni la finance, ni la folie humaine ne sont des sciences exactes.

Les experts du FMI, qui sont de culture américaniste, préconisent les soins intensifs à la Grosse Bertha : il faut transfuser les banques d’un flot d’argent, qui recouvrira pudiquement les créances pourries et bloquera les mauvaises odeurs. La technique est autrement appelée recapitalisation préventive, une façon de mettre du fard sur la pêche du malade pour lui donner l’apparence de la bonne santé. Une telle approche permet de retarder le recours douloureux à la chirurgie lourde, la seule qui permette d’extirper la tumeur maligne que sont les créances irrécouvrables. Cette intervention ultime s’appelle le coup d’accordéon, une musique que les actionnaires n’apprécient guère, car elle les oblige à reconstituer le capital évanoui. On comprend sans peine que lorsque viendra le moment d’entonner cette partition, la planète financière sera confrontée à la réalité toute nue : à savoir la nécessité de passer une bonne partie de ses créances par pertes et profits. La fortune comptable du monde sera alors méchamment écornée. Voilà pourquoi l’hypothèse d’une nationalisation de nos institutions financières, au moins de certaines d’entre elles, serait aujourd’hui, comme le suggère Médiapart, au cœur de la réflexion officielle. Au final, c’est probablement l’option qui prévaudra, comme étant la plus cohérente : elle permettrait d’éradiquer les pratiques sulfureuses du secteur. Au moins en théorie. Mais les esprits suspicieux craignent que ce ne soit le moyen d’exonérer les actionnaires des énormes pertes que le contribuable prendrait alors à sa charge. Heureusement pour ce dernier, il n’en a plus les moyens. Enfin, on l’espère pour lui…

La recette du jour

Service de la patate chaude

Votre bilan a enflé comme la grenouille de la fable. Vous êtes désormais classé comme trop gros pour faire faillite. Mais vos actifs sont constitués de créances douteuses, alors que vos dettes sont bien réelles. Vous avez, sans le vouloir, cuisiné la recette de la patate chaude. Refilez-la sans tarder et sans marchander. Car dès qu’elle refroidit, c’est un véritable étouffe-chrétien.

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