Les banques draguent (...)

Les banques draguent les Cocos

Voilà donc la tendance de l’année dans les milieux bancaires européens : les Cocos. Non, non, il n’est pas question de politique : les banquiers ne font pas de politique ; ils font de l’argent. Non, il n’est pas davantage question des petits haricots inséparables du cassoulet de Castelnaudary : les banquiers préfèrent le vol-au-vent sauce financière. Le must de l’année en cours, ce sont les « contingent convertible bonds  », une recette inventée par les Anglais pour requinquer RBS et Lloyds au début de la crise qui a ravagé les bilans bancaires. Le principe du plat a été conçu par des ingénieurs qui ont fait leurs études à Poudlard, l’école des sorciers de Harry Potter : les titres en cause sont émis sous la forme d’obligations, c’est-à-dire de créances. Mais si la banque traverse une tempête et que son ratio Cooke enfonce une valeur plancher fixée dans le contrat, les obligations se transforment automatiquement en actions. Sans qu’il soit besoin d’agiter la baguette magique ni de prononcer des abracadabra. En d’autres termes, si la solvabilité de la banque se réduit dangereusement, ses dettes en Cocos se transforment derechef en actions. De ce fait, les autorités de contrôle prudentiel ont accepté que lesdits Cocos soient assimilés à des fonds propres dans le calcul du ratio Cooke. Des dettes qui se muent en capital face au danger, même Hollywood n’y avait pas pensé. C’est génial.

Vous allez objecter que le contrat est un peu sévère pour les investisseurs : ceux qui achètent des obligations recherchent ordinairement un revenu pépère et ne veulent pas s’exposer au risque des actions. C’est exact. Alors, comme on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre, les émetteurs ont accepté de servir un coupon bien gras à leurs bailleurs de fonds : entre 8,25% et 9% pour les récentes opérations en France. Vous avez bien lu : votre banque vous prête de l’argent à moins de 3% pour acquérir le manoir de vos rêves, et ce avec des fonds qu’elle a achetés à 9%. – pour améliorer sa solvabilité, paraît-il. Vous n’y comprenez rien ? C’est normal si vous n’êtes ni banquier, ni sorcier. L’explication est pourtant simple. Personne ne veut aujourd’hui souscrire à l’augmentation de capital des banques, sauf à des conditions qui feraient hurler les actionnaires existants – qui seraient fortement dilués. Personne ne veut davantage leur prêter des fonds à des conditions normales : il y a déjà les casinos pour dilapider son argent. Il ne reste donc plus que les usuriers pour se financer, ce qui n’est jamais bon signe. Car rien n’a changé dans la règle immémoriale du commerce, qu’il s’agisse de sous-vêtements, de haricots blancs ou de l’argent : lorsque le prix de vente est durablement inférieur au prix d’achat, on se retrouve rapidement en caleçons.

La recette du jour

Cocos pour gogos

Vous aimeriez vivre comme un nabab mais vous êtes complètement hermétique aux principes du business. Ne désespérez pas : les règles du jeu se sont considérablement simplifiées. Empruntez à prix d’or en émettant des Cocos auprès de gogos. Payez les intérêts avec de nouveaux emprunts : vous avez réinventé le système Madoff. Profitez bien de la vie avant de purger 150 ans de prison.

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