Les valises de Poutine

Les valises de Poutine

Les journaux se consacrent aujourd’hui à des questions sérieuses. Il était temps : nous sommes tous fatigués du déballage incessant à propos d’une prétendue crise de la dette, qui pourrait ruiner l’Europe, l’Amérique et on ne sait qui encore. Des billevesées apocalyptiques. D’ailleurs, les Bourses ont hier démenti les ragots de la presse économique people, en s’offrant un rallye haussier de millionnaire. Nous sommes tous fatigués d’une hypothétique chienlit du monde, qui serait soumis à des tensions explosives ; fatigués des embarras supposés de l’ONU devant la question palestinienne ; fatigués des doutes lancinants sur la réalité du « printemps arabe », que d’aucuns décrivent comme une grossière manipulation du club des nantis. De la pure propagande. Nous sommes fatigués de la multiplication des complotistes, et fatigués aussi des manigances des comploteurs. Il était temps, donc, que l’on se consacrât à des sujets qui comptent sur le plan de la politique internationale. Notamment le cas de la Russie, que les commentateurs ont imprudemment négligé depuis des années.

L’approche de l’élection présidentielle russe offre opportunément l’occasion de combler cette lacune. On apprend dans Le Monde que l’agence de notation Standard & Poor’s ne vote pas pour Poutine, qui « pourrait être un frein à la croissance en Russie ». Un boulet russe, en somme, empêchant l’économie de danser en rond. Et S&P n’aime pas la « démission » récente d’Alexeï Koudrine, ministre des Finances représentant la tendance libérale façon Wall Street. Décidément, ce Poutine ne semble pas disposé à faire allégeance à la finance anglo-saxonne, ce qui témoigne de sa mauvaise éducation et de sa nature belliqueuse. Pire encore, comme le souligne Le Figaro, le Premier ministre en exercice est « soupçonné d’avoir reçu des injections de botox ». Oh non, pas ça ! Lorsque la presse occidentale se met à parler des coquetteries des dirigeants, c’est généralement un mauvais signal : voyez Berlusconi, replâtré comme une diva d’Hollywood, que la haute finance vient de prendre en grippe et s’évertue à déloger de son fauteuil. Voyez ce que les mêmes ont fait à Kadhafi, accusé d’avoir été remastérisé à la truelle. Il y a anguille sous roche, assurément. Voilà un an déjà, Poutine était apparu en conférence de presse décoré de vilaines ecchymoses : les analystes en avaient déduit que l’intervention avait été confiée à ses services de police. C’est injuste. Qui peut en effet reprocher à Poutine d’avoir, par voie chirurgicale, fait disparaître les valises sous ses yeux ? D’autres, apparemment, comptent sur la voie judiciaire pour faire disparaître les valises sous les yeux des autres. Que l’on laisse donc à chacun le choix de sa méthode ; ainsi les vaches seront bien gardées, et les gouvernants bien maquillés.

La recette du jour

Financement électoral discret

Vous êtes candidat aux élections et vous avez, bien entendu, besoin d’argent : la démocratie coûte très cher aux représentants du peuple. Renoncez aux vieilles méthodes de transport d’argent, qui n’amènent que des embêtements. Recourez aux bons soins des chirurgiens esthétiques de Vladimir Poutine et faites-vous insérer deux grosses valises sous les yeux. Les juges n’y verront que du feu.

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