PNB vs BNB : 1 à 0

PNB vs BNB : 1 à 0

Une même idée n’a pas la même valeur selon la personnalité de celui qui l’énonce. Un même trait jeté sur le papier est un gribouillis si son dessinateur est anonyme ; il est l’expression d’un talent prometteur s’il émane de votre jeune bambin ; il devient une œuvre immémoriale si un artiste reconnu en est responsable. De même en littérature : le premier ouvrage sera aussi le dernier pour bien des auteurs qui ne sont pas déjà connus du public par leur présence récurrente sur le petit écran, qu’ils soient journalistes, politiques, sportifs émérites ou pharmacies ambulantes, énervés du caleçon ou découvreuses de balcons pigeonnants. Et qu’il soit rédigé par un nègre ou pompé sur d’autres auteurs. En d’autres termes, l’habit fait le moine. Célébrissime pour le succès planétaire, et mérité, de la saga Harry Potter, dame Rowling vient d’en faire la démonstration éclatante. Elle a publié sous pseudo un roman policier qui a bénéficié, en Grande-Bretagne, d’un réconfortant « succès d’estime ». Parmi les critiques, s’entend, lesquels ont repéré un roman certes « prometteur », mais qui n’a croisé que 1.500 lecteurs depuis sa sortie. J-K Rowling a donc dû éventer le « secret » avant que son éditeur ne fasse un caca nerveux, et qu’elle doive renoncer à de plantureux droits d’auteur. Le coup de com’ a fonctionné : depuis l’aveu, les ventes ont explosé. Mais la manœuvre démontre que la mère du jeune sorcier n’a pas l’étoffe de Romain Gary, dont le double Emile Ajar connut la ferveur du public avant que sa véritable identité ne fût dévoilée.

Une bonne idée ne saurait prospérer sans une exploitation consciencieuse. En témoigne le sort malheureux dévolu au Bonheur National Brut (BNB), une méthode prometteuse d’évaluation du niveau de vie qui n’est pas exclusivement étalonnée sur le PIB. Cette approche a été développée, dès le début des années 70’, par le Bhoutan, un royaume minuscule coincé entre le Tibet, le Népal, l’Inde et le Bangladesh – le carrefour de la misère mondiale. Bien qu’immunisée contre le matérialisme triomphant par une puissante tradition bouddhiste, la population bhoutanaise découvre que les valeurs spirituelles ne suffisent pas à nourrir son homme. Et que vivre de la charité de son voisin indien suppose de lui aliéner sa liberté. Ou de se voir couper les vivres. Sous l’influence du tourisme de masse, les jeunes Bhoutanais arbitrent la sagesse bouddhique contre l’alcool, la drogue et les mauvaises manières. Et ils apostasient le BNB contre une poignée de dollars. Car c’est difficile de glorifier la parcimonie quand on manque de tout.

La recette du jour

Bouddhisme en kit

Vous êtes conscient de l’inconséquence de votre mode de vie. De l’absurdité du gaspillage et de la frénésie d’accumulation. De la sacralisation de l’avoir au détriment de l’être. Vous êtes mûr pour le bouddhisme, la méditation et la contemplation. Comme vous avez déjà tout, ce sera facile. Si vous étiez Bhoutanais, ce serait autrement héroïque.

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