La politique du piolet

La politique du piolet

De nouvelles spécialités sont en train de prospérer dans le métier hasardeux de prospecteur de gemmes précieuses. Plus besoin désormais de tamiser le sable des rivières, ni de s’aventurer dans des galeries périlleuses. Il suffit de dévaliser les bijouteries, qui offrent de riches filons de pierre déjà taillées – ce qui améliore la productivité. Bien sûr, en cherchant du cristal fossile, on risque de récolter une volée de plomb. Ceux qui répugnent à de tels risques opteront pour l’alpinisme. Il semble que le Mont-Blanc constitue un riche gisement de saphirs, rubis et autres émeraudes, que les mineurs ne trouvent jamais rassemblés au même endroit. Cette anomalie géologique s’explique par l’apport d’alluvions venues du ciel – le Mont-Blanc aurait été, par le passé, une sorte de triangle des Bermudes, où les avions de ligne venaient inexplicablement se crasher. Heureux temps que celui où les passagers des vols internationaux pouvaient se trimballer avec toute une quincaillerie précieuse, sous la bienveillante indifférence des douaniers. Désormais, vous ne pouvez plus transporter une valise de biffetons, ni une petite tonne de cocaïne, sans déclencher un pétard d’enfer. Navrant.

En tout cas, la merveilleuse découverte du Mont-Blanc devrait encourager le président Obama à s’équiper de crampons et d’un piolet. Car approche le moment où il devra escalader la falaise fiscale, une épreuve réservée aux sportifs très entraînés. Elle consiste à gravir un étage supplémentaire sur l’Annapurna des dettes du pays. Mais il faut pour cela parvenir à encorder le Congrès, qui jusqu’à maintenant tire à hue et à dia – les voies que veulent suivre les Républicains et les Démocrates sont très éloignées l’une de l’autre. Les Etats-Unis nous jouent régulièrement le coup du suspense au pied de la falaise, et finissent ordinairement par s’accorder sur une route médiane, qui n’évite pas les crevasses. Mais cette fois-ci, chacune des factions semble bien décidée à refuser toute transaction. Faute de compromis, le pays est exposé à l’avalanche honteuse du défaut de paiement vers la mi-octobre. En cas d’armistice, la faillite pour endettement excessif viendrait un peu plus tard. Autant dire que quelle que soit l’option que prendra le chef de cordée, l’expédition américaine n’aura pas la chance de notre alpiniste savoyard : il n’y a pas plus de trésor au pied de la falaise qu’à son sommet.

La recette du jour

Budget à la savoyarde

Vous êtes citoyen américain et désespéré que votre pays ait élu des représentants aussi bornés qu’un sherpa népalais. Encordez la Maison-Blanche et le Congrès au pied du Mont-Blanc : il y a plus de chances qu’ils trouvent un trésor au sommet qu’un accord raisonnable sur le franchissement de la falaise fiscale.

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