Renflouage et renflouemen

Renflouage et renflouement

Voilà des images qui devraient susciter des vocations d’ingénieur, une filière que les jeunes générations semblent délaisser : celles du renflouage du Costa Concordia. Vous vous rendez compte ? Un paquebot dont le gabarit relègue le Titanic à la dimension d’une coquille de noix, renfloué avec succès avant d’être remorqué en vue de son démantèlement. Fortiche. Certes, le sauvetage aura coûté plus cher que la construction du navire ; mais pas tellement plus, finalement. Ce qui fait de la prouesse technique un modèle du genre, que l’on aimerait bien voir dupliqué dans d’autres types de catastrophes. Comme le naufrage d’une centrale nucléaire, par exemple : un tel bidule coûte déjà un bras à construire et une petite fortune à entretenir. Mais en cas de grosse avarie, toute la science accumulée ne suffit pas à recoller les morceaux. Et avant que les atomistes aient découvert les moyens appropriés d’enrayer le désastre, le pays aura boulotté les économies de plusieurs générations à venir –celles qui survivront aux radiations, s’entend.

Il semblerait que les grandes écoles françaises d’ingénieurs aient conservé leur prestige. Mais les petits génies qui en sortent snobent en masse la mécanique des fluides et la physique atomique. Pour embrasser une carrière dans la finance, qui n’est pas une science « dure » mais permet à ses praticiens de bâtir une petite fortune en trois coups d’équations différentielles. En foi de quoi est-il permis de s’étonner que le paquebot de nos finances publiques ne puisse être renfloué, en dépit de l’excellence de notre ingénierie financière. Laquelle, toutefois, n’a pas encore atteint les commentateurs de la grande presse. Ce matin, avec un bel ensemble, nos quotidiens s’alarment du « record » que devrait afficher la dette publique française l’année prochaine. Le phénomène est pourtant plus prévisible encore que le cycle des saisons : maintenant que la dette est quasiment équivalente à la production du pays, tant que le déficit, en pourcentage du PIB, continuera d’être supérieur au taux de croissance, chaque année apportera un nouveau record de la dette – en pourcentage du PIB. Et tant que le budget ne sera pas équilibré – perspective ramenée aux calendes grecques – la valeur nominale de la dette continuera d’enfler, sans aucun doute possible. Pour que les choses changent, il faudra donc attendre qu’un Polytechnicien inspiré invente un nouveau paradigme de gestion, permettant de s’enrichir en dépensant durablement plus qu’on ne gagne. Mais c’est autrement plus ardu que de remporter le « concours Lépine de l’impôt ».

La recette du jour

Rhétorique et illusionisme

C’est un vrai casse-tête d’aider les enfants à choisir une orientation pertinente dans leurs études. Inutile de les diriger vers les métiers de la finance : quand ils seront en âge de travailler, la finance aura sombré. Encouragez-les plutôt à embrasser la rhétorique : on aura toujours besoin de gonfleurs de vessie pour éclairer notre lanterne et renflouer nos espérances.

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