Viagra à la Pyrrhus

Viagra à la Pyrrhus

Ah, ce n’est pas si facile de gagner une guerre. Ou plus exactement, ce n’est pas si facile de protéger les populations civiles d’un pays contre les exactions de son dirigeant. Même quand on est une coalition des plus gros biscoteaux de la planète, gonflés aux stéroïdes moralisateurs ; même quand l’adversaire est un bédouin azimuté et son pays un bac à sable gorgé de pétrole. Ce n’est pas si facile quand les assaillants ont fait bénir leurs intentions faussaires par le grand-prêtre onusien, qui a imposé une « zone d’exclusion aérienne » au-dessus de la Libye – entendez par là que les avions libyens en sont exclus, pas ceux de la coalition. Lesquels ont ainsi le droit de déverser des tombereaux de bombes. Des bombes humanitaires, bien sûr, qui tuent les méchants et épargnent les gentils, les puits de pétrole et les roses des sables. Mais il n’est pas question d’occuper le pays, ah ça, jamais ! Enfin, pas tout de suite. Et pour préparer l’opinion internationale à cette éventualité, strictement prohibée par l’ONU, il convient de renforcer l’action psychologique, autrement appelée la propagande : l’objectif est de noircir encore le tableau du leader libyen ; d’en faire un monstre tel qu’il devienne légitime de s’asseoir sur les résolutions onusiennes au nom des valeurs supérieures de l’ingérence humanitaire.

En foi de quoi a-t-on probablement confié la communication appropriée au Pentagone, qui recrute ses faiseurs de légendes dans le vivier des scénaristes virés par Hollywood. Il en résulte une narrative qui devrait faire un bide même auprès du public le plus crédule. On se souvient que dans les grands conflits du passé, l’état-major était suspect d’assaisonner au bromure le menu du soldat, afin d’anesthésier les pulsions naturelles des jeunes troupes et de prévenir le risque de relations contre nature. Eh bien aujourd’hui, c’est le contraire. Figurez-vous que Kadhafi, qui tue le temps en lisant la presse occidentale, a eu l’idée d’enfourcher la stratégie d’humiliation la plus en vue du moment : le viol. Vigoureusement saisie de la question, la Cour pénale internationale aurait en effet découvert « quelques preuves » de l’achat, par le Libyen priapique, de « conteneurs entiers » de stimulants sexuels. Destinés aux troupes qui seraient officiellement missionnées de viol systématique. Des fusiliers sans armes, en quelque sorte. Nul doute que ces tonnes de Viagra permettront d’embrocher tout ce qui bouge en Libye, chèvres et chameaux compris. Et aussi d’épingler la propagande grossière de la coalition. Ainsi que son impuissance dans ses assauts de missionnaire du Bien.

La recette du jour

Propagande de soudard

Vous êtes en conflit avec un adversaire coriace. Vous avez obtenu son excommunication mais cela ne suffit pas à étouffer son arrogance. Soupçonnez-le d’assaisonner vos concombres d’une bactérie tueuse : vous devriez pouvoir gagner l’adhésion publique à votre cause. Si ça ne marche pas, accusez-le d’avoir dérobé le Viagra de grand-père pour vous violenter. Il sera déshonoré. Et vous aussi.

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