[Salon des Maires 06] Échange avec Pierre Mario, Vice-Président de la FBTP 06

Jeudi 19 octobre au Palais Nikaia l’équipe des Petites Affiches a installé ses caméras au Salon des Communes et des Intercommunalités des Alpes-Maritimes, organisé par l’AMF06. Nous avons pris le temps d’aller à la rencontre des élus et décideurs publics de notre territoire et d’échanger avec eux sur leur situation et leurs préoccupations.
Entretien avec Pierre Mario, Vice-Président de la FBTP 06.

Monsieur Mario est-ce que vous pouvez nous expliquer la présence de la Fédération FBTP06 au Salon des maires ?

La Fédération du BTP des Alpes-Maritimes est un partenaire historique des collectivités locales. Que ce soit les maires évidemment, et aussi toutes les grandes intercommunalités. Ce sont des partenaires, pas juste le jour du Salon des maires, mais toute l’année, avec cette volonté vraiment d’être une force de proposition dans une période où c’est compliqué un peu pour tout le monde.
Il est important de donner son avis, d’essayer de conseiller au mieux pour qu’un euro de la collectivité dépensée soit en quelque sorte le plus utile ou le plus judicieusement dépensé.

- On va parler un peu de la situation du bâtiment en France et un peu dans le département. On est clairement en crise ?

Je crois qu’aujourd’hui ce n’est plus malheureusement un phénomène qu’on redoutait, c’est un phénomène qui arrive et qui s’est accentué depuis le premier trimestre 2023 puisqu’on est à peu près à -35 % de mise en logement, de mise en démarrage des chantiers. On est à -35 % de permis de construire accordés.
On voit aussi que malheureusement, les crédits qui sont accordés notamment aux primo-accédants aujourd’hui sont refusés à hauteur de deux tiers.
Donc effectivement, tous ces ingrédients mis bout à bout font que le secteur du logement est très impacté. Et encore on n’en voit pas vraiment les signes puisqu’il y a encore des chantiers en cours. Le dur à venir, c’est l’année 2024 et 2025 puisqu’au niveau national, notre président a publié il n’y a pas longtemps des chiffres alarmants. On est entre 100 000 et 150 000 pertes d’emplois dans le seul secteur du bâtiment. Et il y en a d’autres autour.

- C’est qu’après toute la chaine va être affectée ?

Absolument. Vous le savez, le bâtiment emploie grosso modo au sens
large l’acte de construire, à peu près 2 millions de salariés dans notre pays.
Donc toute la chaîne va être impactée, que ce soit effectivement les gens qui commercialisent, qui font moins de projets puisqu’il y a moins de 35 % que les gens qui financent, que les gens qui construisent, les gens qui conçoivent les bureaux d’études, les architectes, donc tout le monde est impacté.
Et j’oserais dire même que l’Etat lui même va être impacté et les collectivités locales puisque jusqu’à aujourd’hui la filière du logement était un contributeur net très important au niveau national, on considère à quelque chose près que la contribution nette de la filière logement, c’était une quarantaine de milliards d’euros par an pour la France. Donc ce n’est pas un chiffre neutre.
Et aujourd’hui, pour reprendre un exemple dans notre département, sur l’année 2022, c’était une année record de transactions immobilières, ça a rapporté 690 millions d’euros de droits de mutation à titre onéreux pour le Conseil départemental.
Mais malheureusement cette année, avec moins de 30 % à fin juillet, il faut s’attendre à un recul entre 150 et 200 millions d’euros de recettes en moins,
Quand on sait que nos collectivités locales ont vraiment besoin de ces ressources pour accompagner le social. Il y a de quoi s’inquiéter.
Et évidemment, nous, on va aussi contribuer malheureusement parce qu’avec 100 ou 150 000 sur deux années pertes d’emplois au niveau national, on va être à peu près dans les mêmes proportions dans les Alpes-Maritimes.
Et ces gens là, malheureusement, viendront grossir le nombre des demandeurs d’emploi. Et ça va contribuer à ce recul.

- Ça fait un moment que la fédération du BTP tire la sonnette d’alarme, y compris au niveau local avec son président Patrick Moulard. Qu’est-ce que vous demandez qui n’a pas été fait et qui pourrait être fait et qui pourrait un peu arranger la situation ?

Alors, en gros, pendant quelques années, il y avait une volonté d’accompagner la filière logement avec des prêts à taux zéro, avec effectivement des lois Pinel plutôt très intéressantes à double titre. Le premier, c’est que ça permettait de mettre sur le marché des logements à un prix intéressant. Et puisque ces logements étaient à 20 % en-dessous du prix du marché à la location pendant neuf ans, ça permettait à des investisseurs privés d’investir un peu dans l’outil.
Et comme je vous le disais tout à l’heure, ça rapportait bon an, mal an, une quarantaine de milliards d’euros nets. Donc on est les bras coupés. On ne comprend pas du tout cette loi de finances 2024. C’est pour ça que la filière logement se mobilise fortement pour interpeller, la loi de finances pour 2024 se dessine entre le premier mardi d’octobre et début décembre. Il faut que ce soit validé. Donc aujourd’hui, on essaie de peser de tout notre poids dans nos filières. Alors bien sûr au niveau national. Mais en revanche, on fait une action ici dans les départements, pour anticiper, expliquer qu’on va être dans des situations très compliquées. Et comme je vous disais tout à l’heure, même l’État va être embêté parce qu’il y aura 20 % de PV en moins aujourd’hui. C’est plus qu’inquiétant pour nos filières, mais pour la France en général, et on le dit souvent, quand le bâtiment va, tout va. Là, on s’aperçoit depuis quelques mois que le bâtiment ne va pas bien et malheureusement, on le perçoit tous les jours. Et ça ne s’arrange pas du tout.

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