Médiation administrative : le plaidoyer du Conseil d’État

Pourquoi la médiation ?

Face à une demande de justice en constante augmentation, dans un contexte budgétaire contraint, le recours au juge ne peut plus être la seule modalité de résolution des conflits. Ce n’est pas non plus toujours la solution la plus adaptée aux attentes des personnes.
La médiation dans les litiges administratifs présente à cet égard plusieurs avantages :
 Elle permet de régler plus rapidement les litiges ;
 Elle les règle de manière plus moderne, c’est-à-dire de façon consensuelle et non conflictuelle ;
 Elle les règle de façon souvent moins coûteuse pour les parties et pour l’État ;
 Elle les règle de façon plus efficace parce qu’elle intègre des éléments d’équité, et pas seulement de légalité stricte, qu’elle permet de saisir l’ensemble d’une situation, au-delà de la décision qui a cristallisé le litige, et que la solution est élaborée avec le concours des parties, ce qui en garantit la bonne exécution.

C’est pour ces raisons que le Conseil d’État a commencé, depuis plusieurs années, à s’investir dans le développement des modes alternatifs de règlement des litiges.

Quels nouveaux outils ?

Ces réflexions se sont concrétisées avec l’adoption de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du 21ème siècle et du décret du 18 avril 2017, qui ont élargi le champ de la médiation à l’ensemble des litiges relevant de la compétence du juge administratif et défini un cadre adapté protecteur des droits des parties.
Ces dispositions prévoient un régime complet de médiation en matière administrative.
 La médiation n’est plus seulement limitée aux litiges transfrontaliers ; elle devient un mode de "droit commun" de résolution des différends ;
 La procédure peut être initiée par les parties elles-mêmes avant tout recours - les avocats ont, à cet égard, une responsabilité particulière compte tenu de leur mission de conseil - ou par le juge saisi d’un recours juridictionnel, dans tout domaine de l’action publique ;
 Afin de laisser une vraie chance à la phase amiable, la loi prévoit également que l’ouverture d’une procédure de médiation interrompt les délais de
recours contentieux et suspend les délais de prescription ; les administrés ne sont ainsi pas contraints de former un recours de précaution pour préserver leurs droits pendant la phase de médiation ;
 Enfin, ces textes ont précisé les modalités concrètes du recours à la médiation, en particulier les conditions de désignation et de rémunération du médiateur.

Procédure obligatoire

La loi du 18 novembre 2016 autorise aussi, à titre expérimental pendant quatre ans, une procédure de médiation préalable obligatoire avant toute saisine du juge administratif pour les litiges relatifs à la situation personnelle des fonctionnaires et pour les contentieux sociaux. Le décret et les arrêtés d’application correspondants devraient être publiés avant la fin de l’année pour une entrée en vigueur au 1er avril 2018.
S’agissant du contentieux des fonctionnaires, seront concernés 46 départements pour les litiges relatifs à la fonction publique territoriale, trois académies pour les litiges concernant le personnel de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et tout le territoire pour le contentieux des agents du ministère des affaires étrangères.
S’agissant des contentieux sociaux, six départements sont concernés pour les litiges relatifs à certaines aides sociales versées par les CAF (RSA, APL, aides de fin d’année), et trente départements, pour les litiges concernant Pôle emploi (radiation des listes de demandeurs d’emploi et allocation de solidarité spécifique).

En conclusion

"Le développement de la médiation administrative est un défi à relever collectivement. Tous les acteurs sont appelés à s’impliquer : les collectivités publiques, les avocats, les professionnels de la médiation, le Défenseur des droits, les centres de gestion de la fonction publique territoriale, les médiateurs institutionnels et les juridictions administratives elles-mêmes, auxquelles il appartient de détecter les dossiers qui pourraient être plus utilement réglés par la médiation que par un jugement" a conclu le vice-président du Conseil d’État.

Ce qui a déjà été entrepris

Plusieurs mesures concrètes ont été prises depuis l’adoption de la loi du
18 novembre 2016 :
 Un référent national médiation a été nommé.
 Un référent médiation a été désigné dans chaque juridiction administrative.
 Des conventions-cadres pour encourager la médiation sont en cours de
signature entre les tribunaux, les barreaux et les administrations locales.
 Des brochures sur la médiation administrative ont été éditées et diffusées au public dans toutes les juridictions.
 Des journées de sensibilisation à la médiation, ouvertes aux avocats et aux administrations, ont été organisées dans les huit cours administratives d’appel.
 Plus de 260 médiations ont déjà été lancées en 2017 dans de nombreux domaines (fonction publique, urbanisme, aides sociales, marchés publics…) et 
61 % d’entre elles ont abouti à un accord dans un délai de trois à quatre mois, soit beaucoup plus rapidement qu’un jugement.