Droit : le grand dépoussié

Droit : le grand dépoussiérage des lois devenues obsolètes

Le Sénat a entrepris un nettoyage pour abroger des textes anciens "inutiles" ou "inapplicables" qui sont encore légion...

Du B.A.L.A.I...

Sur proposition de Vincent Delahaye, le bureau du Sénat a mis en place, en janvier 2018 la mission "B.A.L.A.I.", acronyme signifiant "Bureau d’Abrogation des Lois Anciennes et Inutiles", visant à recenser les lois inappliquées ou inapplicables.
Ainsi a t-on parlé de longue date d’empilement législatif, voire de "supprimer deux lois anciennes pour toute nouvelle adoptée"... sans résultats vraiment probants jusqu’à présent.

Les chiffres

Les chiffres peuvent en effet surprendre : pour la seule année 2018, le Journal
Officiel a compté 71 521 pages. Il était porteur de 45 lois, 1 267 décrets et 8 327 avis réglementaires... L’ordre juridique français compte ainsi 320 458 articles, dont 25% à valeur législative et 75% à valeur réglementaire.
Dans cette masse, il y a sans aucun doute matière à tamiser pour revenir à plus de clarté et d’efficacité...

Proposition de loi

Des commissions sénatoriales doivent repérer les dispositions législatives
inappliquées qui justifieraient une abrogation, mais aussi les dispositions obsolètes parce qu’elles correspondraient à des situations de fait ou de droit
qui n’existent plus. Ou parce qu’elles étaient transitoires ou à durée déterminée, ou encore incompatibles avec les engagements internationaux de la France.

"Superfétatoires"

À l’issue de ces premières étapes, une proposition de loi est déposée pour permettre l’abrogation des dispositions identifiées. "À plus long terme",
on devrait aussi procéder au recensement des lois "superfétatoires" qui imposent des obligations disproportionnées ou posant d’importantes difficultés d’interprétation.

Depuis 1800...

Vincent Delahaye veut travailler "au nom de la crédibilité du droit et de sa lisibilité". L’ambition de supprimer des textes ne répondant pas "aux canons de la loi" va d’abord porter sur des textes adoptés entre 1800 et 1940. Une quarantaine d’entre-eux devraient être ainsi abrogés dans un article unique. De nouvelles propositions pourront être déposées ultérieurement par les sénateurs pour poursuivre ce grand "ménage".

Des exemples

La loi du 28/12/1880, jamais abrogée, autorise l’achat du matériel d’impression du Journal Officiel. Elle a donc épuisé ses effets juridiques. Surtout que le J.O. est maintenant... dématérialisé. La loi du 3/08/1844, qui fixait à 20 ans le droit d’auteur des ayant-droits des dramaturges, a été abrogée puisque ce droit est aujourd’hui porté à 70 ans dans le code de la propriété intellectuelle. La loi du 14/08/1885 continue de régir les sociétés de patronage des détenus libérés, alors qu’elles ont été remplacées par les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP).

Rien de nouveau...

Déjà au 16ème siècle, Montaigne écrivait : "Nous avons en France plus
de lois que le reste du monde ensemble et plus qu’il n’en faudrait à régler tous les mondes d’Épicure". Son cadet Montesquieu partageait le même avis : "Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires”.
Quant à Benjamin Franklin, il estimait que “les lois trop douces ne sont pas suivies, les lois trop sévères ne sont pas appliquées.”
Tout était déjà dit, non ?

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