Impôts sur les revenus et vente immobilière : attention à la CEHR !


Finance


12 décembre 2025

Un contribuable peut vendre un bien immobilier sans aucune plus-value imposable… et se retrouver pourtant confronté à une surtaxation significative.
En cause : la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), un mécanisme souvent méconnu, mais dont les effets pratiques sont loin d’être anecdotiques, notamment à l’occasion d’opérations patrimoniales ponctuelles.

Créée par la loi de finances pour 2012, la CEHR est codifiée à l’article 223 sexies du Code général des impôts (CGI).
Elle constitue une contribution additionnelle à l’impôt sur le revenu, et non un impôt autonome. Autrement dit, elle s’ajoute à l’impôt déjà dû, dès lors que certains seuils de revenus sont franchis.
Code général des impôts, art. 223 sexies

Une surtaxe déclenchée par le revenu fiscal de référence :
Le déclencheur de la CEHR n’est ni la nature du revenu, ni son caractère exceptionnel, mais le revenu fiscal de référence (RFR) du foyer fiscal.

Les seuils sont les suivants :

  1. 250 000 € de RFR pour une personne seule,
  2. 500 000 € de RFR pour un couple soumis à imposition commune.

Au-delà de ces montants, la CEHR s’applique par tranches, avec un taux de 3 %, puis un taux de 4 % sur les fractions les plus élevées.

Important : la CEHR est calculée sans application du quotient familial, ce qui neutralise l’effet atténuateur des parts fiscales. BOFiP – BOI-IR-CHR

Vente immobilière : le piège des revenus “non imposables”
Attention, accrochez-vous, c’est ici que le mécanisme devient pervers ou contre-intuitif.

Certaines opérations patrimoniales, notamment : la vente d’un bien immobilier détenu depuis plus de 22 ou 30 ans, ou la cession de la résidence principale, peuvent être exonérées de plus-value immobilière, donc non imposées au titre de l’impôt sur le revenu.
Mais ces sommes entrent néanmoins dans le revenu fiscal de référence. (RFR)
L’effet pervers : un contribuable peut ne payer aucun impôt sur la plus-value, mais voir son RFR dépasser brutalement les seuils de la CEHR… et subir une contribution exceptionnelle de plusieurs milliers, voire dizaines de milliers d’euros.
Service-Public.fr – CEHR

Exemple concret :
Un contribuable célibataire déclare habituellement 45 000 € de revenus annuels.
Il vend un bien immobilier ancien, sans plus-value imposable, pour 475 000 €.
Son RFR atteint alors 520 000 €.

CEHR due :
250 000 € à 500 000 € soit ici une première tranche : 250 000 × 3 % = 7 500 €
20 000 € au-delà, prise en compte de la deuxième tranche : 20 000 × 4 % = 800 €

Total CEHR : 8 300 €, sans qu’aucune plus-value n’ait été fiscalement imposée.
Ce qui change en pratique : l’effet cumul avec les nouveaux dispositifs

Si la CEHR n’est pas nouvelle, cependant le contexte fiscal évolue fortement.
La loi de finances récente a introduit, pour les revenus 2025, une contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) visant à garantir un niveau minimal d’imposition pour certains foyers fortement dotés en revenus exceptionnels ou faiblement fiscalisés.

Sans se substituer à la CEHR, cette nouvelle contribution s’y superpose, renforçant la nécessité, d’anticiper les effets de seuil, d’analyser les conséquences d’une opération patrimoniale ponctuelle, et de raisonner non plus uniquement en impôt “facial”, mais en RFR global.
Ministère de l’Économie – CDHR

À retenir : La CEHR est une surtaxe automatique, calculée sur le revenu fiscal de référence.
Une opération non imposable peut néanmoins déclencher la CEHR.
Les ventes immobilières sont un cas typique de mauvaise surprise fiscale.
Le nouveau contexte législatif renforce l’importance d’une stratégie patrimoniale anticipée, intégrant le RFR comme indicateur central.

Plus que jamais, la fiscalité patrimoniale ne se limite pas à la question de la plus-value ou de l’exonération, mais impose une lecture globale et prospective des revenus.


François-Xavier CIAIS