Le diable se cache entre les parenthèses...


Economie


26 octobre 2017

À une époque où, partout sur terre, des milliards de dollars s’échangent en permanence par dessus nos têtes d’un seul clic de souris, on a (bien) fini par comprendre que le pouvoir (réel) des politiques s’est réduit comme peau de chagrin.
Difficile de lutter contre la gouvernance des multinationales, de plus en plus riches, qui peuvent par calcul (fiscal) et par leur puissance (financière) déplacer facilement leurs activités et leurs emplois, des pays étant toujours prêts à leur ouvrir les bras !
C’est tellement vrai que le Grand Duché du Luxembourg et l’Irlande, pour ne pas les citer, ont renoncé à encaisser des impôts (pourtant dus) par des géants comme Google et Amazon. Il ne s’agit pas là d’une largesse accordée entre bons amis, mais de la peur de perdre ces sociétés qui pourraient être tentées d’aller voir ailleurs (si d’aventure on avait l’outrecuidance) de leur réclamer ce qu’elles doivent.
Nous voici donc (presque) revenus à l’époque du Far West. Sinon que les
diligences ont été remplacées par les banques centrales, et que dans le rôle du pompier, il est fait appel à la générosité des contribuables pour éteindre les incendies allumés par la déréglementation, la spéculation effrénée, le court termisme (souvent boursier) érigé en dogme, un (hyper) capitalisme écervelé que plus personne ne contrôle. C’est pourquoi, sur la forme davantage que sur le fond, j’ai été (assez) épaté par la prestation de Macron dans l’étrange lucarne l’autre soir. Alors que tout s’est accéléré, que les radios et télés réclament aux politiques des réponses en 30 secondes (au mieux) y compris sur des sujets complexes, le président a pris le temps de développer sa pensée pour expliquer son action.
De cela, au moins, il faut lui donner acte.
C’est même devenu tellement rare que l’on est tout surpris qu’il ait pris le temps de prendre son temps. Il n’a pas expédié un problème d’une formule "pschitt" comme Jacques Chirac avant lui. Et s’il s’est lâché sur un petit "croquignolesque", cela fait écho à "l’acadabrantesque" que lui avait, paraît-il, soufflé naguère Dominique de Villepin.
Emmanuel Macron s’est donc adressé à l’intelligence (plutôt qu’à l’émotion). Il a décortiqué, précisé, au risque peut-être de perdre son public (entre 9 et 10 millions de téléspectateurs). En tous cas, les sondages réalisés après l’interview montrent que les deux tiers des gens sont "insatisfaits" de l’action du président et du gouvernement.
Expliquer, toujours expliquer, en espérant convaincre, telle est la question. S’il ont moins de pouvoirs que par le passé, les politiques doivent au moins sauver les apparences...


Jean-Michel Chevalier