Vous avez vraiment envie que l’on lise par dessus votre épaule ?


Economie


29 mars 2018

Honteux, peut être. Confus, rien n’est moins certain. Se jurant en tous cas à lui même qu’on ne l’y prendrait plus, c’est sûr... Mark Zuckerberg, le patron de Facebook dont la modestie n’est pas la qualité première, a bien été obligé de faire acte de contrition en public lorsque les pratiques - sinon douteuses du moins extrêmement discutables - de sa société sur les tripatouillages de nos données ont été révélées dans l’affaire Cambridge Analytica...
Sans même nous en rendre compte, pendant des années, nous avons nourri l’ogre numérique GAFAM en lui livrant au moment de nos inscriptions des renseignements en apparence bien anodins mais qui, mis bout à bout, dressent le "portrait" de l’individu en dessinant les contours de ses préférences politiques, religieuses, consuméristes...
Tant qu’il s’agit d’agréger des données pour nous vendre des voitures ou des voyages en envoyant des publicités ciblées, rien de très méchant. Le problème, c’est que le moindre clic est enregistré, que les algorithmes en déduisent notre façon de vivre et de penser, parce que l’on va plutôt sur tel ou tel site, à telle ou telle heure. Quelque part - on ne sait jamais où - ces datas son stockées, analysées, croisées, enrichies. Et l’on continue ainsi sans s’en rendre compte à alimenter les vampires du net qui décident - pour notre bien et surtout celui des actionnaires - de nous envoyer des push, des infos, des pubs selon nos centres d’intérêt supposés.
C’est une manipulation soft, rampante, insidieuse, qui a déjà commencé à modifier nos comportements puisqu’on nous livre tout cuit sur les écrans ce que nous devons voir, lire, acheter, penser.
Les périodes de crise sont propices aux grandes remises en question. Il est souhaitable que cet épisode Facebook provoque une prise de conscience générale.
Avec la RGPD, l’Europe a instauré quelques barrières pour endiguer les dérapages sournois, les CNIL de chaque pays des vingt-sept étant chargées de recevoir les signalements, de mener des enquêtes, et de frapper ces sociétés là où elles sont le plus sensibles : au portefeuille.
À titre perso, je n’ai pas de compteFacebook, mais cela n’empêche pas Zuckerberg de tout savoir sur moi - ou presque - avec ces liens invisibles et telluriques qui raboutent entre elles ces grandes sociétés. Et, franchement, s’il est avéré que l’influence de sa société sur les cerveaux américains a pu influencer le vote en faveur de Trump, je n’ai pas du tout envie qu’il vienne lire dans mon cerveau, par dessus son épaule.
Et vous ?


Jean-Michel Chevalier