Université : grève, occupation et intervention de la police...


Droit


27 avril 2018

"Blocages", "grèves étudiantes", "occupations" et autres dégradations : des nuisances pour les étudiants "dont c’est le devoir de travailler et de réussir leurs examens" [1] sont réelles.

Depuis le Moyen-Âge l’université est sanctuarisée : les forces de l’ordre ne peuvent y entrer qu’à la demande du président de l’établissement.
Un privilège qui signifie que le "blocage" d’une université par des personnes qui y sont étudiantes, ou par des éléments extérieurs, ne relève en réalité pas aujourd’hui d’une infraction pénale.
Les articles 431-22 et 431-23 du Code pénal répriment le fait de pénétrer ou de se maintenir dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement scolaire sans y être habilité.

"Scolaire" ou "universitaire"

Dans l’affaire de Montpellier, le Doyen de la faculté de Droit et un professeur ont été mis en examen pour notamment "complicité d’intrusion dans un établissement scolaire, selon ce qu’en a rapporté la presse. Ils sont suspectés d’avoir favorisé ou organisé l’entrée de personnes armées de gourdin pour déloger manu militari des étudiants qui occupaient les lieux. Le Doyen a démissionné.

La Cour de Cassation précise que les établissements d’enseignement supérieur ne sont pas des établissements scolaires et que l’incrimination de l’article 431-22 du Code pénal ne trouve pas à s’y appliquer.
En clair il n’est pas possible de poursuivre pénalement les auteurs d’une "intrusion" dans une enceinte universitaire avec les dispositions susvisées.
Une réforme législative simple pourrait cependant débloquer ces situations : la suppression du mot "scolaire" dans l’article 431-22 du Code pénal.

Ce petit changement permettrait d’incriminer les opérations de blocages ou de déblocages sauvages des universités et libérerait du même coup les présidents des établissements de la responsabilité compliquée qui leur est donnée vis-à-vis des personnels et des étudiants

(1) Propos tenus par Emmanuel Macron.

NOTE DE LA RÉDACTION - Référence de l’article et informations complémentaires

Blocages des universités et code pénal : remplir le vide pour résoudre l’insoluble ?
Par Charles Prats est magistrat à la cour d’appel de Paris. Il a été magistrat au sein de la délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) au ministère du budget de 2008 à 2012, chargé de la coordination de la lutte contre les fraudes fiscales, douanières, sociales et le travail illégal. Il est par ailleurs m ?embre du conseil scientifique du Conseil supérieur de la formation et de la recherche stratégiques (CSFRS).


Marie Lesimple