Problématique du contentieux des honoraires de l’avocat


Paroles d’expert


26 novembre 2018

Le contentieux de la fixation et du recouvrement des honoraires est une activité à temps plein des bâtonniers.

Par Philippe KAIGL, Maître de conférences, Université Côte d’Azur, Faculté de droit et science politique de Nice, membre du CERDP, France, avocat au Barreau de Grasse

En effet, le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 leur donne pouvoir pour statuer sur « les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats » (art. 174), que la réclamation provienne de l’avocat non payé ou du client contestant la facture de son avocat (art. 175 : « Les réclamations sont soumises au bâtonnier par toutes parties »). Il s’agit de l’un des volets du pouvoir juridictionnel que la loi reconnaît au bâtonnier, au point qu’il a pu être qualifié de « magistrat d’un ordre professionnel » (Anne Le Gallou, Le règlement des litiges par le bâtonnier de l’Ordre des avocats, revue juridique de l’ouest, 1993, p. 577-594).

Comme toute action en justice, l’action en fixation des honoraires d’un avocat est soumise à un délai de prescription. Toute réclamation tardive est vouée à l’échec.

Première difficulté  : le délai pour agir n’est pas le même selon que le bâtonnier est saisi par l’avocat qui réclame le paiement de ses honoraires ou par le client qui conteste la facture de son avocat.
Dans le premier cas, le délai de prescription extinctive est de deux ans, conformément aux dispositions générales de l’article L 218-2 du code de la consommation (« L’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans »). Dans trois arrêts du 26 mars 2015 (n° 13-28359, 14-15013, 14-11599), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a déclaré ce délai de deux ans applicable à la demande d’un avocat en fixation de ses honoraires.

En revanche, lorsque c’est le client qui veut agir en contestation de la facture d’honoraires de son avocat ou en restitution des honoraires qu’il estime avoir payés en trop, le délai de prescription applicable est certainement le délai de droit commun édicté à l’article 2224 du code civil : cinq ans.

Seconde difficulté : elle est inhérente à tout délai de prescription. Quelle est la date servant de point de départ du délai de prescription ?

L’article L 218-2 du code de la consommation ne contient aucune précision à ce sujet. Fallait-il retenir la date de la facture d’honoraires ? C’est un autre critère que vient de consacrer la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 4 octobre 2018 (n° 17-20508) : « le point de départ du délai de prescription biennale de l’action en fixation des honoraires d’avocat se situe au jour de la fin du mandat et non à celui, indifférent, de l’établissement de la facture ».

Cet arrêt enrichit la problématique car la « fin de mandat » est elle-même une date incertaine.


Maître Philippe KAIGL