Elle est par où la sortie de la crise ?


Economie


20 décembre 2018

S’il restait encore des gilets jaunes aux carrefours et devant les centres commerciaux ce dernier week-end, c’est parce que, pour avoir trop attendu, Emmanuel Macron est devenu inaudible pour une large part de ces personnes affichant leur désespoir en fluo.
Mettons de côté les casseurs, pour ne retenir que le sort de ceux qui vivent avec mille euros ou moins par mois. La question est de savoir s’ils ont pu trouver leur "compte" dans les annonces du chef de l’État.
- Oui, pour ceux travaillant au SMIC, avec la promesse d’un billet de cent euros en plus à la fin du mois. Mais le périmètre de cette mesure n’englobe pas tous les smicards. Il n’y aura donc pas que des gagnants dans cette tranche de salaire...
- C’est à voir pour les "petits" retraités, dont les revenus mensuels du foyer ne dépassent pas les 2 000 euros. Ils ne gagneront rien dans l’affaire, mais "économiseront" tout de même la hausse de la CSG, qui leur était promise pour 2019. Pour eux, c’est donc le statu-quo. Mais pour ceux qui sont plus aisés, c’est la confirmation d’une perte qui s’ajoute à la non-indexation des pensions sur le coût de la vie.
- Pour la plupart des salariés, c’est le grand point d’interrogation. Le gouvernement a renvoyé habilement la balle aux entreprises, les invitant à verser une prime, sans aucune obligation. Cette "prodigalité" limitée à
1 000 euros sans charges ni fiscalité reste à l’appréciation des dirigeants, de l’état de santé de la boîte, du carnet de commandes, etc.
Cette dernière mesure a de quoi hérisser le poil de nos maillots jaunes de la contestation puisque, justement, ils réclament davantage... d’égalité. Même parmi les salariés de la classe moyenne, mieux vaut être employé dans une société du CAC 40 - où l’on bénéficie d’un CE de compétition, de l’intéressement et d’autres avantages - que chez le modeste artisan ou commerçant du coin, qui n’aura pas forcément les moyens à la fin de l’année de tirer un chèque supplémentaire...

Le discours télévisé du président était parfait dans la forme, avec la dose de gravité nécessaire, et un ton plus empathique qu’à l’accoutumée. Que ne l’a t-il tenu au début du quinquennat : il aurait alors eu tout loisir d’expliquer que sa politique était équilibrée, que si l’on ne relevait pas l’impôt des plus riches pour leur éviter de déguerpir à l’étranger, on prenait des mesures sociales d’équilibre avec ce coup de pouce sur le SMIC, la prime de fin d’année, etc.
Et si l’on s’était abstenu de toucher à la fiscalité du diesel, à annoncer aux retraités la hausse de leur CSG, on n’en serait peut-être pas arrivé à cette crise de confiance avec l’exécutif. Elle a obligé à prendre des mesures sous la pression, dont on ne sait pas encore si elles seront suffisantes pour calmer les esprits. Seule certitude : mises bout à bout, elles coûteront au bas mot - entre dépenses supplémentaires et pertes de recettes - dans les
10 milliards d’euros pour la seule année prochaine, creusant un peu plus le déficit et faisant sortir notre pays des "clous" de l’orthodoxie budgétaire.

Bref, nous sommes arrivés exactement où Emmanuel Macron, entêté, ne voulait pas aller. Tout ça pour ça...


Jean-Michel Chevalier