Le LBD ne serait donc pas dangereux, mon œil !


Economie


7 février 2019

Selon le ministère de l’Intérieur, avant le 12ème acte des gilets jaunes joué ce dernier week-end, les forces de l’ordre avaient tiré à 9 228 reprises avec les LBD (lanceurs de balles de défense de 40mm). Une arme sensée être non létale (heureusement !), mais quand même de dissuasion massive. Bien plus puissante en tous cas que les tonfa (matraques) qui s’abattent "traditionnellement" sur la tête des manifestants.

Le problème, c’est que ces LBD ont causé des blessures graves. Entre une dizaine, "selon la police", et une vingtaine "selon les organisateurs". Quel que soit leur nombre, il se situe de toutes manières au-delà de l’acceptable et de la bavure isolée. Des personnes ont été éborgnées. Pour certaines, elles n’étaient ni des casseurs - forcément plus exposés aux tirs en raison de leur "activité - ni même des manifestants ordinaires, mais de simples passants dont le tort a été de se trouver au mauvais endroit, au mauvais moment.
La Ligue des droits de l’homme et la CGT ont déposé devant le Conseil d’état un référé-liberté pour réclamer la suspension du LBD. Ces deux organisations n’ont pas été écoutées.
Dans leur arrêt, les sages de la place du Palais Royal ont rappelé que "les conditions d’utilisation de ces armes sont strictement encadrées par le code de la sécurité intérieure, afin de garantir que leur emploi est, d’une part, nécessaire au maintien de l’ordre public compte tenu des circonstances et, d’autre part, proportionné au trouble à faire cesser. Ces conditions ont été réitérées à l’occasion de chaque manifestation et s’accompagnent désormais de l’obligation pour les forces de l’ordre de filmer, dans la mesure du possible, l’usage fait du LBD".

Loin de nous l’idée de considérer avec angélisme les scènes de violence inacceptables auxquelles des individus se sont livrés et la nécessité de maintenir l’ordre et... la sécurité. Mais si le Conseil d’Etat a bien dit le Droit, qu’en est-il de la "morale" ? Une fois, ça va, mais avec dix ou vingt blessés graves, le doute n’est plus permis : même bien utilisé, même bien encadré, le LBD est dangereux. Il doit être raccroché au râtelier.

Le moment est venu de s’interroger sur la méthode du maintien de l’ordre. Et, peut-être, de s’inspirer de ce qui se fait en Allemagne, où la police évite au maximum le contact direct avec les manifestants. Par des filtrages en amont, par des hommes identifiables chargés de dialoguer, par des hauts parleurs indiquant les "intentions", le pourquoi et le comment des manœuvres. Ainsi, lorsqu’il y a une charge, elle n’impacte généralement que les éléments radicalisés, qui viennent d’ailleurs souvent pour en découdre. Les interventions ne se font pas forcément dans la douceur, mais du moins évitent-elles les dégâts collatéraux.


Jean-Michel Chevalier