CHU : le diagnostic de la Chambre régionale des comptes


Finance


18 novembre 2019

La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur a rendu public son rapport sur la gestion du centre hospitalier Universitaire de Nice.

Un contrôle qui a porté sur la gestion depuis 2012 " dans un environnement marqué par une forte concurrence du secteur privé et une offre de soins publique significative". La CRC fait monter la température en soulignant "une situation financière qui s’est dégradée, principalement en raison de la dérive des coûts et des délais de l’opération de construction du site Pasteur 2" et en indiquant que ce "bâtiment s’avère surdimensionné en nombre de lits offerts par rapport aux besoins et intègre insuffisamment les nouvelles modalités de prise en charge telle que l’ambulatoire".

"Endettement critique"

Les juges rappellent que l’établissement a été obligé de signer un contrat de retour à l’équilibre financier de 40 M€ sur cinq ans avec l’agence régionale de santé en raison "d’un endettement critique de 400 millions d’euros fin 2017, soit une hausse de +36% par rapport à 2012" et aussi d’un "faible dynamisme" des recettes.
Pour rééquilibrer les plateaux de la balance, le CHU a fermé deux cents lits et supprimé les postes de travail correspondants.
Une potion amère, mal vécue par les personnels qui s’estiment en nombre insuffisant de façon structurelle (une maladie chronique...).
Toutefois, "la situation de l’établissement s’améliore en 2017 en raison principalement de recettes conjoncturelles issues de l’optimisation du codage de son activité". Mais si les premiers résultats sont encourageants, "l’établissement doit encore engager des évolutions structurelles capacitaires lourdes pour respecter ses engagements".
La Chambre régionale rappelle que dans ce contexte la mise en œuvre du nouveau projet d’établissement 2018-2022 comportant notamment un volet patrimonial pour 310 M€ "ne peut s’affranchir d’un effort structurel accru pour assainir la situation financière du CHU".

Quel juste prix pour notre santé ?

Dans leur sécheresse comptable, les chiffres ne disent pas tout. Leur contrôle pointilleux effectué par les magistrats de la CRC sont évidemment nécessaires car il pointe des erreurs d’appréciation qui apparaissent évidentes... après "coût". Le regard extérieur et impartial de spécialistes est précieux pour corriger ce qui peut encore l’être, et éviter des écueils à venir. N’en demeure pas moins que s’il est "facile" de soustraire à la calculette et de rayer d’un trait de plume un service déraisonnablement déficitaire ou des postes "en trop", c’est l’humain, la solidarité et le vivre ensemble que symbolise l’hôpital. Jusqu’où sommes-nous prêts à payer pour notre propre santé et celle des plus fragiles qui n’ont que le secteur public pour panser leurs petits et gros bobos ?

Ne tirez pas sur l’ambulatoire !

- Le "virage ambulatoire" que rend possible l’évolution des techniques médicales et auquel incite fortement le ministère de la santé "n’a pas été suffisamment pris en compte".
- Pour la Chambre régionale, les pratiques de l’établissement dans ce domaine "demeurent encore à développer malgré l’identification déjà ancienne d’une nécessaire progression. Le projet d’établissement 2008 - 2022 précisait en effet déjà la présence insuffisante de ce mode de prise en charge sur le CHU de Nice".
- "Fin 2017, hormis en médecine (taux de remplissage de 210,7%), les
capacités ambulatoires étaient sous-utilisées avec un taux de remplissage de 85,7% en chirurgie et de 60% en gynécologie - obstétrique, très éloignées du taux cible défini nationalement de plus de 130%".

Les chiffres

- 16ème CHU de France sur 32 en volume d’activités.
- 1 668 lits et 204 places répartis sur huit sites (2017).
- 300 000 mètres carrés mais 200 000 seulement sont exploités, dont un tiers "vétustes".
- 480 M€ le prix de construction réel de Pasteur 2 pour une estimation initiale de 195 M€.


Jean-Michel Chevalier