L’impôt sur le revenu baisse, vraiment ?


Paroles d’expert


23 janvier 2020

"La loi de finances pour 2020 prévoit une baisse de l’impôt sur le revenu qui concernera près de 17 millions de foyers fiscaux".

Le gouvernement l’annonce à coups de grands renforts médiatiques. Peut-être avez-vous déjà reçu un courriel vous indiquant que "Vous bénéficiez de cette baisse d’impôt" et que "Grâce au prélèvement à la source, elle sera effective dès ce début d’année".

Par Maître Julien ALQUIER, Avocat en droit fiscal au barreau de Nice, Chargé d’enseignement à l’Université Nice-Sophia Antipolis, Doctorant au sein du laboratoire CERDP (E.A n°120).

Ainsi, le gouvernement fait d’une pierre deux coups en se félicitant de l’intérêt de la mise en place du prélèvement à la source tout en vantant les mérites de sa politique fiscale. La loi de finances pour 2020 prévoit en effet une baisse de 5 milliards d’euros de l’impôt sur le revenu à compter de l’imposition des revenus 2020 dont bénéficieront les classes moyennes. Il convient pour l’occasion de faire le point sur cette mesure en rappelant succinctement les modalités d’imposition sur le revenu.

Un barème progressif modifié

La baisse d’impôt annoncée pour 2020 est obtenue grâce à la modification du taux de la première tranche d’imposition du barème progressif de l’impôt sur le revenu. En 2019, les taux d’imposition à appliquer sur la tranche correspondante étaient de 0% jusqu’à 10 064 €, 14% de 10 065 € à 27 794 €, 30% de 27 795 € à 74 517 €, 41% de 74 518 € à 157 806 € et 45 % pour les revenus de plus de 157.807 €. Pour l’année 2020, la baisse résulte du changement de taux de la 1ère tranche des revenus qui passe de 14% à 11%. Le gain moyen estimé par le gouvernement pour un foyer fiscal serait de 350 € pour la première tranche et au maximum de 573 € pour les contribuables dont le revenu fiscal de référence se situe entre 20 819 € et 22 825 € par part.

Autrement dit, cette baisse ne concerne principalement que les foyers dont le taux marginal relève de la première tranche d’imposition.

En effet, pour les foyers relevant de la tranche au taux de 30 % du barème progressif, la baisse est plafonnée à un montant de 125 € pour une part et pour les foyers relevant des tranches les plus élevées du barème progressif, c’est-à-dire les taux de 41% à 45%, il ne devrait y avoir aucune baisse. Cette dernière sera neutralisée car les limites de la deuxième tranche du barème sont également ajustées. Si le taux de la première tranche d’imposition du barème progressif de l’impôt sur le revenu est abaissé à 11% au lieu de 14% à compter de l’imposition des revenus perçus ou réalisés en 2020, en revanche la deuxième tranche du barème imposée au taux de 30% débute à 25 659 € pour se terminer à 73 369 € (au lieu de respectivement 27 794 € et 74 517 € en 2019). En d’autres termes, les personnes dont le revenu fiscal de référence dépasse 25 659 € ne seront plus imposées à 14% mais à 30%.
De même, la tranche à 41% de taux d’imposition s’élargit débutant à 73 369 € contre 74 517 € précédemment ce qui signifie que des contribuables dont le taux marginal était 30% pourront passer dans la tranche supérieure. Ce sont, entre autres, ces modifications qui permettent d’annuler la potentielle baisse d’impôt sur le revenu pour les foyers imposés dans les tranches à 41% et 45%. Pour mieux comprendre, un bref rappel du calcul de l’impôt sur le revenu s’impose.

Le calcul de l’impôt sur le revenu

Tout d’abord, pour déterminer son imposition il est nécessaire de connaitre son revenu net imposable en calculant la somme de tous les différents types de revenus du contribuable tels que les salaires, les revenus fonciers, les pensions, les revenus du capital, etc. Ces revenus sont calculés en fonction des éventuels abattements applicables à chaque type de revenus. Ensuite, l’autre donnée importante qu’il vous appartiendra de ne pas négliger est la détermination du nombre de parts de quotient familial. Il se calcule au regard de la composition du foyer fiscal.
À titre d’exemple, lorsque vous avez des enfants à charge, vous bénéficiez de parts supplémentaires de quotient familial. Mais un contribuable peut également voir le nombre de parts augmenter selon sa situation. Enfin, la division de ces deux données, le revenu net imposable par le nombre de parts de quotient familial, permet d’obtenir un résultat sur lequel on applique le barème progressif de l’impôt sur le revenu précédemment
détaillé. Le résultat doit alors être multiplié par le nombre de parts du quotient familial afin de déterminer le montant de l’impôt sur le revenu.

Bien entendu, il ne s’agit que des grandes étapes du calcul de l’impôt sur le revenu qui n’ont rien d’exhaustives car de nombreux éléments peuvent intervenir comme le plafonnement du quotient familial, la décote en cas de faibles ressources, la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus de 3 à 4 %, des réductions ou crédits d’impôt, etc.

En conclusion, pour les déclarations d’impôts compliquées, n’hésitez pas à faire appel à l’aide d’un professionnel comme votre avocat fiscaliste.


Maître Julien ALQUIER