Mes photos chez les "cops"


Economie


13 février 2020

Vous avez déjà posté des photos de vous et de votre entourage sur Facebook, Linkedin, Instagram, Twitter, YouTube et sur d’autres sites et applications ? Oui : pas de chance ! Vos clichés ont été "aspirés" par la société américaine "Clearwiew AI" qui a enregistré et classé trois milliards (!) d’images, non pas pour réaliser un bel album de famille de la
population mondiale mais pour les revendre - au mieux - aux forces de police US, au pire à qui voudra bien les acheter pour en faire ce que l’on ne sait pas encore...
Grâce à "Clearview AI" (traduction vue perçante, intelligence artificielle), le shérif d’un obscur patelin de l’Amérique profonde peut vous identifier sans lever le derrière de son siège de voiture. Formidable, n’est-ce pas ? Pendant que vous traversez la rue, son ordinateur embarqué passe à la moulinette les milliards de photos qui vont - peut-être - "matcher". On voit d’ici les dégâts "collatéraux" possibles, sinon très probables, ne serait-ce qu’avec l’exemple caricatural des jumeaux.
Eh bien figurez-vous que même Facebook, Instagram, Twitter et les autres, habituellement peu regardants sur la "privacy", ont trouvé à redire à cette exploitation des photos confiées à leur site par nous autres, Terriens anonymes, qui sommes les auteurs inconscients de notre propre préjudice. Ces firmes ont mis en demeure "Clearview AI" de cesser de capter les clichés (et ceux déjà dans la mémoire alors ?)
Selon le New York Times, qui a levé le lièvre, six cents services de police US seraient déjà abonnés. On ne sait encore rien sur d’éventuels autres clients, ni sur leurs motivations. Mais à une époque où n’importe qui peut orienter le résultat d’une élection avec quelques clics bien sentis, on peut se faire du souci....
Imaginons que cette exploitation de reconnaissance faciale soit couplée à un système préventif comportemental (cela existe déjà, ils sont censés "dénoncer" des personnes prêtes à passer à l’acte, par exemple dans le tramway). Notre shérif US n’aura plus qu’à aller directement chez le "suspect" pour l’interpeller en pyjama au saut du lit, avant même que celui-ci ait eu le temps d’enfiler ses chaussettes pour aller éventuellement braquer la banque du coin. (Comme disait Jacques Brel : "c’est pas sûr mais quand même peut-être")
Le système est conçu "pour ne prendre que des informations disponibles publiquement" plaide le patron de "Clearview AI". Un argument en béton, qui procède de la même logique que celle de Trump lorsqu’il propose d’armer les professeurs pour lutter contre la circulation libre des armes d’assaut qui permettent à des fous d’aller se défouler dans les couloirs des lycées.

Vous envisagez des vacances à New York ou en Californie, vous avez déjà "posté" des photos, vous voulez rester anonyme ? Essayez la chirurgie esthétique...


Jean-Michel Chevalier