Regards croisés pour réveiller la trésorerie des entreprises


Economie


6 novembre 2020

Covid oblige, les temps sont durs et particulièrement anxiogènes pour les chefs d’entreprises. Pour nombre de structures mises en difficulté par la crise sanitaire, l’heure est à la recherche de soutiens en tout genre, qui prennent aussi bien la forme de mesures d’urgence, comme celles instaurées par le gouvernement et les collectivités, que de conseils avisés, formulés par les experts habitués à accompagner au quotidien les entrepreneurs.
C’est sur ce terrain que le cabinet niçois WABG Avocats & Associés a souhaité apporter sa pierre à l’édifice de la sauvegarde économique en réunissant, le 5 novembre, un administrateur judiciaire, un notaire, un expert-comptable et un avocat pour un partage d’expériences au service des entreprises.

Au cœur de cet échange : la trésorerie, qui constitue un enjeu majeur pour les dirigeants. En la matière, plusieurs outils et astuces permettent de réveiller des actifs dormants. A condition de les connaître et de s’avoir s’entourer des bonnes compétences pour les actionner judicieusement...
Plusieurs options pratiques ont ainsi été présentées à des chefs d’entreprises en quête d’information au cours de cette rencontre baptisée "La matinale du dirigeant" qui, initialement prévue en format physique, s’est finalement déroulée en mode digital, via un webinaire qui en appellera d’autres. Les instigateurs et spécialistes intervenants de ces "regards croisés pour une vision à 360° de l’entreprise" ont en effet prévu de renouveler l’opération régulièrement. D’autres thèmes, tout autant importants pour la pérennité de l’économie azuréenne, sont à l’étude. A suivre...

Ce qu’il fallait retenir

Me Nathalie Thomas Administrateur Judiciaire : Des procédures qui font peur, mais qui sont efficaces

Il ne faut pas avoir peur des procédures de traitement des entreprises en difficulté, "car elles permettent, de manière interne, de réveiller des actifs dormants" qui sont à la disposition du dirigeant sans qu’il puisse les utiliser. C’est le message de Maître Nathalie Thomas, administrateur judiciaire, qui a notamment évoqué le mandat ad hoc, la conciliation et la procédure de sauvegarde. Les deux premières ont l’avantage d’être confidentielles et amiables. Le conciliateur a alors pour mission de restructurer l’entreprise et l’action auprès des créanciers peut prendre plusieurs formes : convertir du découvert en crédit à moyen terme, discuter une réduction de loyer... Si ces options sont insuffisantes, l’entrepreneur peut solliciter une procédure de sauvegarde, une solution préventive, car l’entreprise ne peut pas être en cessation des paiements. "L’intégralité du passif va être gelée de manière à reconstituer de la trésorerie".

Me Thomas Lobry, notaire : Abandon de loyer : une incitation fiscale pour les bailleurs

Maître Thomas Lobry, notaire associé chez Poulpiquet, a présenté la piste de l’abandon de loyer. Depuis la première vague de Covid-19, "toutes les sociétés commerciales ont la possibilité de déduire les abandons de leur résultat imposable" à condition qu’il n’y ait pas de lien familial, ascendant ou descendant, entre le bailleur et le preneur, "sauf à justifier par tout moyen les difficultés de trésorerie de l’entreprise". Nouveauté de la deuxième vague, un crédit d’impôt de 30% du montant des annulations de loyers est prévu pour les bailleurs des entreprises fermées administrativement dans le secteur des HCR. Outre cette incitation fiscale, Maître Thomas Lobry a rappelé la possibilité, dans le cadre d’une donation et dans certaines conditions, de bénéficier, jusqu’au 30 juin 2021, d’un abattement supplémentaire de 100 000 euros, la somme devant être affectée au capital d’une petite entreprise.

Dominique Dazza, expert-comptable : Les prêts participatifs, une alternative aux PGE

Exonération totale des cotisations sociales pour les entreprises contraintes à fermer, réactivation du fonds de solidarité (l’aide peut désormais atteindre 10 000 euros) et prolongation du recours aux PGE jusqu’au 30 juin 2021, voilà trois opportunités citées par Dominique Dazza, expert-comptable. Et d’y ajouter, en cas de refus de PGE, les prêts participatifs. Instruit par le CODEFI, ce dispositif permet d’obtenir 10 000 à 50 000 euros selon les effectifs de l’entreprise, voire 100 000 euros exceptionnellement. Son atout : une durée plus longue, soit 7 ans contre 5 ans pour le PGE, et un différé d’amortissement d’un an, "ce qui permet de lisser un peu les difficultés", a souligné Dominique Dazza, en citant deux astuces comptables à envisager en complément : la revalorisation des actifs corporels et financiers, "qui redonne des fonds propres et une capacité à s’endetter", et le refinancement de l’immobilier nécessaire à l’exploitation.

Me Marielle Walicki : Restructurer l’entreprise et présenter un meilleur bilan

Premier éclairage proposé par Maître Marielle Walicki, avocate en droit des affaires : les accords de performance collective (APC). Cet outil, bien connu des grandes entreprises, est également adapté aux TPE, PME et ETI. Grâce à un cadre juridique allégé, il permet des retouches organisationnelles qui ont trait à la durée du travail, à la rémunération et aux conditions de mobilité professionnelle ou géographique internes. Maître mot de la démarche, afin de ne pas supprimer des emplois : la négociation avec le personnel. Dans ce domaine, "il est indispensable d’être suivi par un avocat spécialiste en droit social, car il y a un risque de contentieux".
Dans un autre registre, Marielle Walicki a mis l’accent sur l’intérêt de l’abandon du compte courant d’associé jusqu’à un retour à meilleure fortune afin de "nettoyer le bilan". Une façon d’alléger les dettes financières et de renforcer les capitaux propres pour redevenir éligible à des prêts.

Pour aller plus loin : Il ne faut voir dans ces informations qu’un maigre résumé des options présentées au cours du webinaire pour aider les entreprises à mobiliser les ressources nécessaires à la poursuite de leur activité. Pour connaître les détails du recours à ces mesures, il convient de prendre attache avec un spécialiste.


Jean PREVE