Dette covid : elle sera en principe absorbée à l’horizon 2042


Finance


16 novembre 2020

Les bébés nés aujourd’hui seront-ils mis à contribution pour payer les emprunts Covid ?

Pas de hausse d’impôts, du moins pour le moment, mais prolongation "envisagée" de la CRDS pendant vingt ans pour absorber le prix de la crise sanitaire. Scénario probable et... possible ?

La dette Covid-19 sera t-elle payée par les bébés qui naissent aujourd’hui En partie, oui ! La crise sanitaire a fait déraper les comptes publics jusqu’à amener la dette à 120% du PIB, soit le niveau atteint par la Grèce dans les années 2 000, qui paraissait insupportable aux pays européens "riches"... Mesures économiques pour les entreprises, chômage partiel, arrêt quasi total de l’activité au printemps ont fait bondir la dette française de 20% en un an.
Avons-nous atteint le niveau le plus élevé de la dette ? Pas sûr. Est-ce grave docteur ? Tous les experts ne sont pas d’accord. Les "pessimistes" - Cour des Comptes, Ministère de l’économie, Banque de France, instituts privés - tirent la sonnette d’alarme tandis que des économistes "optimistes" expliquent que les émissions nouvelles de dette publique ont dans les faits été achetées par la Banque Centrale.
Pour les "optimistes", il est probable que les Banques Centrales de la zone euro conserveront sans les revendre ces titres sur leur bilan et les renouvelleront à l’échéance pour éviter le retour d’une crise des dettes publiques. Ou, autrement dit, les dettes émises par l’Etat n’auront pas à être remboursées puisqu’elles sont détenues par la Banque Centrale. La politique financière de la BCE qui achète de la dette publique à tour de bras plaide pour ce schéma favorable. Une vision qui n’est pas partagée par l’association des "contribuables associés" : "Le constat de la commission des finances de l’Assemblée Nationale est sans appel. Nous assistons à la pire dégradation de nos finances publiques depuis la seconde guerre mondiale" écrit-elle dans sa dernière lettre sous le titre "La France passe de l’endettement au surendettement".

Annulation impensable

Cette association chiffre à 2 800 milliards d’euros la dette fin 2021, soit "bien plus que toutes les richesses produites par la France en un an. C’est plus de 11,5 fois les recettes fiscales perçues par l’Etat (244 Mds) ou encore 73 879 € par ménage". Ces contribuables inquiets rappellent au passage une déclaration de la présidente de la BCE Christine Lagarde qui juge "impensable" l’annulation des dettes de la crise.
Les taux d’intérêt très bas, voire négatifs, pratiqués sur les marchés font que l’Etat emprunte "pour rien" ou presque pour le moment. Tous les pays de la zone euro sont logés à la même enseigne et eux aussi contraints à se financer pour absorber la crise.
Le risque pour la France se situera au moment du redécollage, lorsque ses indicateurs sur la dette ne seront pas en sa faveur par rapport à nos voisins allemands. Il en coûtera alors (beaucoup) plus cher pour emprunter, ce qui réduira la compétitivité et risque de nous entraîner dans une spirale négative.
Dégager des marges de manœuvre, hors endettement, supposera donc de rouvrir le débat sur les hausses d’impôts et la baisse des dépenses publiques...
Bruno Le Maire envisage d’isoler 150 milliards d’euros pour créer une "dette Covid" à part. Son remboursement pourrait être financé par l’allongement de la CRDS qui devait être supprimée en 2024. Le ministre de l’économie et des Finances envisage donc un échéancier s’étalant jusqu’en 2042, et c’est pourquoi des bébés nés aujourd’hui seront mis à contribution pour payer les emprunts Covid sur les premiers salaires de leur vie active...


Jean-Michel Chevalier