Création d’entreprise : La Covid-19 ? Même pas peur !


Economie


22 décembre 2020

Pas de baisse des chiffres de la création d’entreprise malgré la crise sanitaire !

Plutôt que de freiner la création d’entreprise, la crise sanitaire et ses conséquences économiques ont incité les Français à se lancer. Le plus souvent individuellement.

2020, an I de la crise sanitaire et économique de la Covid-19. Et du signe moins, qui a pris place devant les principaux indicateurs de conjoncture. Moins d’emploi, moins de croissance, moins de rémunération et un PIB que la récession devrait faire chuter de 9% selon les dernières estimations de l’Insee et de la Banque de France. Dans cet océan de chiffres négatifs, seule l’île de la création d’entreprise parvient à émerger.
2019 avait été un grand millésime pour la création d’entreprise. Mais 2020 sera encore plus faste. Sur les douze derniers mois, la hausse est de 4,5%. C’est ce que montrent les chiffres publiés la semaine dernière par l’Insee. Rien qu’en novembre, 84 295 nouvelles structures ont été enregistrées en France, un total inédit au cours des vingt dernières années. Il fait suite à des bilans mensuels supérieurs à 80 000 depuis juillet.
Cette augmentation est une des conséquences de la pandémie du coronavirus, mais elle s’inscrit dans une tendance sociétale bien antérieure aux nécessaires adaptations découlant du ralentissement de l’économie et des confinements. Les données de l’Insee montrent qu’environ 18 000 entreprises voyaient le jour chaque mois en 2000. Un chiffre variant autour des 22 000 en 2005, puis autour des 50 000 en 2009 et 2010, au lendemain de la crise financière de 2008. Après quelques années de baisse, la dynamique haussière a repris son cours depuis 2017. En 2020, la courbe des créations d’entreprises a varié au gré des restrictions. Ainsi, après un début d’année riche, dans la lignée de la moyenne de 2019, les chiffres ont chuté au printemps, avec seulement 34 347 créations en avril. Le record de novembre témoigne des différences entre les deux confinements. Le premier a été marqué par la sidération, le second par la réaction.

Boom des livraisons

L’effet Covid-19 apparaît dans l’analyse des secteurs qui ont généré le plus de créations. Sur les trois derniers mois, un gain de 19% est observé par rapport à la même période en 2019. Et c’est dans les activités de poste et de courrier que la hausse est la plus importante (+14 700 créations). "Cet essor reflète notamment le développement des services de livraison à domicile", note l’Insee. Plus de 69% de nouvelles entreprises ont ainsi un lien avec les transports et l’entreposage. Sur 12 mois, ce secteur s’est avéré le plus porteur (+16,8%). Toujours au cours des 12 derniers mois, les nouveaux entrepreneurs ont aussi choisi l’immobilier (+9,8%), l’industrie manufacturière (+9,1%), la réparation d’autos et de motos (+8,3%)... Parmi les filières moins attractives : l’enseignement, la santé... Et, bien sûr, l’hébergement et la restauration (-0,5%), même si 4 530 créations sont à noter en novembre.
Les difficultés du marché du travail sont une incitation à l’entrepreneuriat. Plutôt que de chercher un emploi salarié, ils ont été nombreux à préférer créer leur propre activité. C’est ce qu’expliquait récemment Guillaume Pepy au journal Le Monde. Et le président du réseau Initiative France, accompagnateur des créateurs, d’évoquer deux catégories : les jeunes diplômés se lançant de façon provisoire, faute de mieux, et les bénéficiaires de plans de départs volontaires optant pour une reconversion de conviction, souvent en direction d’activités plus solidaires et orientées vers le développement durable.
Sur un an, les créations d’entreprises individuelles ont gagné du terrain (+7,4%) tandis que les sociétés en ont cédé (-3,2%). Et les trois quarts des entrepreneurs ont décidé de se lancer seul. Là encore, l’année 2020 témoigne d’une tendance de fond due à l’envolée du nombre d’autoentrepreneurs depuis la création de ce statut (microentrepreneur aujourd’hui) en 2009. Fin 2019, la France comptait presque autant d’autoentrepreneurs que de travailleurs indépendants commerçants, artisans ou issus des professions libérales (1,7 million contre 1,9 million). Leur poids économique est en revanche incomparable, puisque le revenu moyen des premiers n’était que de 6 000 euros par an contre 43 000 euros pour les seconds !


Jean PREVE