Sade, trésor national et appel à mécénat


Culture


25 février 2021

Un appel à mécénat a été lancé pour l’achat des "Cent vingt Journées de Sodome"

Par les temps qui courent, le divin marquis aurait certainement des démêlées avec MeeToo et la justice. Mais Donatien Alphonse François de Sade est passé à la postérité pour ses frasques – réelles pour certaines et fantasmées pour d’autres – qui ont donné à la langue française un nom commun sur les pratiques d’alcôve.

Appel au mécénat

Le ministère de la Culture veut que le manuscrit des « Cent vingt Journées de Sodome » soit conservé ad vitam aeternam à la Bibliothèque nationale comme un bien inaliénable. Il a donc lancé un appel au mécénat d’entreprises pour réunir les 4,55 millions d’euros nécessaires à l’achat de ce rouleau de papier long de douze mètres (et large de 11,5 centimes seulement) que Sade recopia en 1785 alors qu’il était emprisonné à La Bastille après quelques exploits sexuels sulfureux qui le firent condamner. Une fois de plus, car il a passé 27 années de sa vie derrière les barreaux.

Le manuscrit, de la main du marquis, a disparu pendant près d’un siècle, sans doute dérobé au moment de la prise ou du démantèlement de la forteresse devenue le symbole de la tyrannie royale. Il passera ensuite de mains en mains, dans celles d’un psychiatre allemand qui publiera pour la première fois le roman en 1904, puis dans celles de plusieurs collectionneurs. Il sera finalement racheté en 2014 par Gérard Lhéritier, homme d’affaires français, qui a fait l’objet d’une enquête pour escroquerie dans le cadre de l’affaire « Aristophil ».

Saisis par la justice, le rouleau et son étui ont été classés en 2017 comme « trésor national » par Françoise Nyssen, alors ministre de la culture.

L’œuvre de Sade a longtemps suscité admiration et polémique. Bonaparte lui même a considéré que Justine est « le livre le plus abominable qu’ait enfanté l’imagination la plus dépravée  ». Quant aux « Cent vingt journées de Sodome », le texte a longtemps circulé sous le manteau avant d’être réhabilité par l’éditeur Jean-Jacques Pauvert qui gagna en 1957 un procès contre la censure.
Depuis, ce texte sulfureux est devenu un classique (entré dans la Pléïade) qu’il ne faut cependant pas laisser tomber dans des mains trop naïves et innocentes…


Jean-Michel Chevalier