Euthanasie : l’impossible union sacrée des députés sur ce sujet sociétal


Droit


16 avril 2021

Pourquoi la récente proposition de loi sur l’euthanasie suscite autant de réactions, décryptage

La récente proposition de loi sur l’euthanasie, qui n’a pu être votée par les députés, a rouvert le débat, suscitant des réactions au-delà des politiques : de Line Renaud à Michel Houellebecq.

Il faut distinguer l’euthanasie active de l’euthanasie passive. L’euthanasie active est l’administration de substances létales dans l’intention de provoquer la mort, à la demande du malade qui désire mourir, ou sans son consentement sur décision d’un proche ou du corps médical. L’euthanasie passive est le refus ou l’arrêt d’un traitement nécessaire au maintien de la vie. La loi du 22 avril 2005, dite loi Leonetti, a instauré le principe du refus de l’obstination déraisonnable et le droit du refus de tout traitement. Celle du 2 février 2016 a créé de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dont le droit à la sédation profonde et continue jusqu’au décès, à la demande du patient.
L’Espagne est devenue le 18 mars le sixième pays au monde à autoriser le recours à l’euthanasie, après les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, le Canada et la Nouvelle-Zélande. "Aujourd’hui nous sommes un pays plus humain, plus juste et plus libre", a réagi Pedro Sanchez, président du gouvernement espagnol, après l’adoption de la loi par 202 votes pour, 141 contre et 2 abstentions.
3866. C’est le nombre des amendements déposés à l’Assemblée qui ont rendu impossible l’examen de la proposition de loi donnant le droit à une fin de vie libre et choisie, défendue par Olivier Falorni. Pour que le texte revienne dans l’Hémicycle, la majorité parlementaire doit de nouveau l’inscrire à l’ordre du jour. Mais le gouvernement n’y est pour l’instant pas favorable. "Ce débat a besoin de temps" a déclaré devant les députés le ministre de la Santé Olivier Véran.
C’est le premier article de la proposition de loi qui a suscité les plus vives oppositions parmi les députés : "(…) Toute personne capable et majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, provoquant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu’elle juge insupportable, peut demander à disposer (…) d’une assistance médicalisée active à mourir".

Dans une tribune parue dans le Journal du Dimanche du 4 avril, 272 députés ont réclamé le droit de débattre : "ce texte étant examiné dans le cadre d’une niche parlementaire – journée réservée à l’opposition –, il ne pourra être mis au vote et adopté que si l’examen aboutit à la fin de cette journée. (…) Oui, il est temps de débattre du sujet au Parlement. (…) Cette question traverse notre société depuis quarante ans".

Des réactions

"Le 8 avril, vous aurez à examiner un texte très important. Capital même ! Capital parce qu’il touche à notre bien le plus précieux, la liberté. Notre liberté ultime et souveraine : celle de mourir dans la dignité ! (…) Si notre vie nous appartient, il doit absolument en être de même pour notre mort" a écrit l’actrice Line Renaud, également vice-présidente de Sidaction, dans une lettre adressée aux députés.
"[…] Lorsqu’un pays – une société, une civilisation – en vient à légaliser l’euthanasie, il perd à mes yeux tout droit au respect. Il devient dès lors non seulement légitime, mais souhaitable, de le détruire, afin qu’autre chose – un autre pays, une autre société, une autre civilisation – ait une chance d’advenir", a assuré Michel Houellebecq, l’auteur des Particules élémentaires, dans une tribune parue dans Le Figaro du mardi 6 avril.


Sébastien Guiné