Les algorithmes vont-ils terroriser les terroristes ?


Droit


18 mai 2021

L’Intelligence artificielle est en mesure de traiter une masse de données importante

Dans la sempiternelle course entre les gendarmes et les voleurs, le numérique a fait son entrée il y a quelques années en permettant aux premiers de se livrer à de nouveaux délits, généralement astucieux, et aux deuxièmes d’affiner leurs surveillances et leurs enquêtes.

Ainsi, alors que des petits ‘rigolos’ ont réussi tout récemment à pirater le pipeline vital qui traverse et alimente les Etats-Unis (on pouvait le supposer très sécurisé…), les polices du monde entier s’intéressent de près aux algorithmes qui peuvent les mettre sur des pistes.

En France, à l’occasion du nouveau et énième projet de loi contre le terrorisme présenté fin avril en conseil des ministres, le gouvernement veut pérenniser l’usage des algorithmes. Ils sont déjà autorisés à titre expérimental par la loi depuis de juillet 2015 dont les effets ont été repoussés deux fois et jusqu’au 31 juin de cette année. Il s’agit de renforcer ces mesures mises en place auparavant, voire de les renforcer.

Dans un monde de connexion, l’Intelligence artificielle est en mesure de traiter une masse de données importante bien plus vite que ne pourraient le faire de (nombreux) gendarmes ‘physiques’. Elle peut détecter les comportements, les profils potentiellement dangereux pour faire remonter l’information de la masse de la data.

Alors que les algorithmes ne « travaillent » aujourd’hui que sur les données téléphoniques, Gérald Darmanin rêve d’étendre leurs actions aux adresses URL. Ce qui permettrait de repérer toute personne se contactant à un site jihadiste par exemple et de la placer discrètement sous surveillance.

Pas besoin d’être grand clerc pour imaginer les détournements possibles et les effets potentiellement dévastateurs sur la vie privée, voire politique, syndicale ou confessionnelle des individus surveillés « électroniquement ». D’autant que tous les couplages et croisements sont techniquement possibles : il y a un risque de Big Brother, dénoncé par des associations comme La Quatradure du Net, qui dénonce un spectre « tellement large, que l’on ne sait pas vraiment ce que la loi autorise  ». Pour les opposants, il y a un risque de « dérive "liberticide" de la politique de protection des données en France  ».
"Toutes les mesures que l’on prend visent à protéger les Français, mais elles se font dans le cadre de l’Etat de droit", commente Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement.

Jusqu’où faire intervenir l’Intelligence Artificielle ?

Comment s’assurer qu’elle n’empiétera pas sur les libertés individuelles et « en même temps » assurer une surveillance pour protéger le citoyen. Les derniers attentats commis en France l’ont été par des personnes qui étaient inconnues et passées au travers de tous les filets. Il y a aussi des limites d’efficacité pour les algorithmes et il serait illusoire de penser qu’ils apporteraient une « assurance tous risques »…


Jean-Michel Chevalier