Au royaume d’absurdie, une petite dose de Pompidou ferait du bien...


Economie


17 octobre 2021

L’édito hebdo de Jean Michel Chevalier qui évoque Georges Pompidou cette semaine

Un soir de 1966, à Matignon, le Premier ministre était de mauvaise humeur. à un jeune conseiller du nom de Jacques Chirac venu lui faire signer pléthore de décrets, Georges Pompidou, déclara : "mais arrêtez donc d’emmerder les Français !". L’empilement de lois et de textes divers qui complexifiaient (déjà) la vie de nos concitoyens provoqua la colère de ce Normalien agrégé de littérature au langage habituellement plus châtié.

On pourrait reprendre cette expression aujourd’hui avec la généralisation annoncée des voitures radar banalisées. Elles sillonneront tout le territoire en 2022 pour traquer l’excès de vitesse, petit ou grand. Au nom des grands principes et des bons sentiments, cela va sans dire, pour faire baisser l’accidentologie.
Sauf qu’au volant de ces voitures anonymisées, dont le flash infrarouge - suprême raffinement - ne sera pas détectable par les usagers de la route, il y aura non pas des gendarmes ou des policiers assermentés comme cela devrait être mais des employés d’une société privée dont on se doute bien qu’elle ne fait pas ce travail que pour le bien public...
Ce dispositif orwellien est testé dans plusieurs départements. Comme dans celui du Cher, où la préfecture de Bourges joue tellement la transparence sur cet essai qu’elle ne communique pas le nombre des PV dressés depuis le début de l’expérience.
Il n’y a que les grincheux et autres défenseurs du service public pour y trouver à redire. Car, c’est bien connu, la privatisation est la clé de nos problèmes. Grâce à elle, les sociétés d’autoroutes font les poches des automobilistes pour rémunérer grassement leurs actionnaires. Pareil pour le stationnement en ville. Alors pourquoi pas les excès de vitesse... en attendant mieux ?
Par exemple, on pourrait aussi privatiser la justice pour accélérer les cadences et réduire les stocks : finalement, rien de tel qu’un procureur, qu’un magistrat, qu’un greffier payé au rendement.
On pourrait aussi privatiser totalement les maisons d’arrêt, qui seraient classées sur TripAdvisor pour leur confort et leur qualité d’accueil. Et au Quai d’Orsay, franchement, plutôt que des ronds de cuir transpirant sous les exigences contradictoires des ministres qui se succèdent, pourquoi pas des contractuels encadrés par un DRH qui fixerait des objectifs ? Avec une telle configuration, la Pologne voulant s’affranchir du droit européen, aurait du souci à se faire !
Il suffirait d’un peu de courage politique, que diable ! Alors oui, mille fois oui, aux photos de nos excès de vitesse prises par on ne sait qui. Oui aux initiatives modernes qui décoiffent !
Après tout, ces derniers temps, les Français n’eurent à supporter que les gilets jaunes et le 80 km/h sur route, la hausse répétée du prix du gaz, celle des carburants, la baisse des indemnités de chômage, les confinements successifs, les vaccinations obligatoires, le pass sanitaire, la désertification médicale qui galope, les manifestation "anti tout", la mévente des sous-marins, le nouveau disque de Gérard Lenormand. J’en oublie.
Au secours, Georges Pompidou, au secours, revenez vite !


Jean-Michel Chevalier