La science a besoin de modèles féminins


Economie


17 octobre 2021

Le 7 octobre, trois chercheuses des Alpes-Maritimes ont reçu le Prix Jeunes Talents L’Oréal-UNESCO, destiné à améliorer la représentativité des femmes dans la science.

Océane Dufies, doctorante au Centre méditerranéen de médecine moléculaire (C3M), est originaire de Cannes et vit à Nice. Elle a été récompensée pour ses travaux sur la détection de bactéries pathogènes qui stimulent le système immunitaire.
Melpomeni Dimopoulou, post doctorante au Laboratoire d’informatique signaux et systèmes de Sophia Antipolis (I3S), habite Antibes. Le prix L’Oréal-UNESCO lui a été décerné pour ses recherches sur le stockage de données numériques dans de l’ADN synthétique, qui offre une capacité beaucoup plus importante que les disques durs.
Stella Bitchebe, qui habite Lyon, est doctorante au laboratoire I3S de Sophia. Elle a été reconnue pour son travail visant à réduire l’empreinte carbone des centres de données, tout en améliorant leur sécurité.
Le Prix L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science, organisé à l’occasion de la Fête de la Science (1-11 octobre), a été créé dans le but "d’accélérer les carrières des femmes scientifiques et de lutter contre les obstacles qu’elles rencontrent, pour qu’elles puissent contribuer à la résolution des grands défis de notre temps", selon la Fondation L’Oréal.

Tribune

Pour sa 15e édition, 35 doctorantes et post-doctorantes ont été mises à l’honneur, parmi plus de 700 candidatures. Recevoir ce prix "est une grande reconnaissance. En général, on manque un peu de confiance en nous", confie Océane Dufies. "La Fondation nous offre des outils pour être, je l’espère, de grandes chercheuses plus tard". Melpomeni Dimopoulou relève que "c’est une très belle récompense" pour ses efforts et une source de "grande motivation". Pour Stella Bitchebe, "cela représente une très grande fierté. C’est un prix que je vise depuis le début de ma thèse. Et c’est une tribune pour atteindre l’un de mes objectifs, qui est de rayonner dans ce domaine pour attirer le plus de jeunes filles possible". I
l est important de rappeler que les femmes restent peu présentes dans la recherche scientifique, représentant seulement 33 % des chercheurs dans le monde et 28 % en France. Si l’on regarde les plus grandes récompenses, l’écart devient abyssal : moins de 4% des prix Nobel de science ont été décernés à des femmes. Océane Dufies explique que dans son environnement professionnel, le fait d’être une femme n’a jamais été un "problème", soulignant que son "directeur de recherche (la) soutient énormément".

Plafond de verre

Néanmoins, "il y a beaucoup de chercheurs hommes et on n’a sans doute pas assez de modèles. Après le doctorat, plus on monte les échelons et plus le pourcentage de femmes diminue. Je pense que les femmes vont plus privilégier la vie personnelle que la vie professionnelle, qui demande énormément. C’est un équilibre compliqué à avoir, même si les hommes essaient de prendre de plus en plus de responsabilités au sein de la famille", avance-t-elle. Pour Melpomeni Dimopoulou, "le plus grand problème, c’est que les femmes hésitent car il y a très peu de modèles de femmes dans la science. Et c’est une carrière dans laquelle il y a beaucoup d’incertitudes, avec les CDD. Et il faudrait plus d’aides pour la maternité". Stella Bitchebe abonde sur le manque de modèles : "Si on parle de Marie Curie à une jeune fille c’est tellement loin dans son imaginaire… Alors qu’il y a plein de femmes actuellement qui font des choses concrètes et qui seraient plus proches d’elle".
Les scientifiques primées ont reçu une dotation (15 000 € pour les doctorantes, 20 000 € pour les post-doctorantes) et ont bénéficié d’une formation au leadership (management, négociation, prise de parole en public, etc.) visant, selon la Fondation L’Oréal, "à leur donner des moyens supplémentaires pour mieux affronter le plafond de verre qui demeure une réalité dans le monde de la recherche".


Sébastien Guiné