Experts judiciaires : Les spécificités de l’expertise pénale


Droit


10 décembre 2021

L’UCEJAM organisait une formation mercredi 8 décembre sur les "éléments de procédure pénale"

En matière pénale, "jusqu’à l’audience, vous ne nous avez pas sur le dos". Voici brièvement résumées par Me Cédric Porteron les relations entre les experts et les avocats lors de la procédure pénale, contrairement à la procédure civile (où les liens sont réguliers).

L’avocat niçois était l’invité de l’UCEJAM(Union des compagnies d’experts de justice des Alpes-Maritimes et du sud-est) pour parler d’éléments de procédure pénale, mercredi 8 décembre, dans l’un des amphithéâtres de la Faculté de droit et science politique de Nice.
"L’expertise pénale se construit pas votre intermédiaire. L’expert travaille avec le dossier, répond à des questions et fournit un rapport à celui qui lui a demandé. Il n’aura pas de contact direct avec un avocat. Et c’est ce qui agace le plus l’avocat !", a poursuivi Me Porteron, qui avec malice, avait déclaré en préambule que c’était "la première fois de (sa) vie" qu’il se trouvait "face à autant d’experts". Il a ensuite distingué trois phases dans la procédure pénale : l’enquête, l’instruction et l’audience, rappelant que 96% des affaires pénales passaient directement de l’enquête à l’audience et que l’avocat n’intervenait pas.
En phase d’enquête, les experts judiciaires interviennent à la demande des enquêteurs.
Dans le cadre d’une instruction (4% des affaires), "l’avocat va pouvoir solliciter des actes, dont l’expertise fait partie", a précisé Me Porteron, qui est également chargé d’enseignement. Pour les expertises techniques, "la rencontre entre l’expert et les parties mises en cause n’est possible qu’à la demande du juge, si la personne y consent. Ce qui est rare", a souligné Me Porteron.

Seul

Au sujet des audiences, l’avocat niçois a expliqué qu’en correctionnelle il était "rare qu’un expert soit cité" mais qu’il pouvait l’être. Quant à la cour d’assises, il a indiqué que les expertises pouvaient être nombreuses : techniques (balistique par exemple), médicales, psychologiques... Et qu’alors les experts allaient avoir les avocats "sur le dos".

Outre Me Porteron, étaient présents à la formation le Pr Xavier Latour, Doyen de la Faculté de droit et science politique de Nice, François Talon, président de l’UCEJAM et les experts Jean Garnero, Frédéric Aknouche, Thierry Chastang, Michel Cusenza et Philippe Camilleri, qui ont partagé des cas pratiques. Le Dr Frédéric Aknouche, expert en toxicologie, a ainsi prévenu ses confrères qu’en cour d’assises, "chaque mot (pouvait) être utilisé par la défense pour désorienter l’expert ou influencer le jury". Jean Garnero, expert en accidentologie, a relevé "qu’en France, l’expert judiciaire au pénal est seul. Soyez attentifs et très méticuleux. Ce qui compte, c’est la qualité des constatations. Elles sont essentielles". La dimension solitaire de l’expert a été confirmée par Philippe Camilleri, expert en informatique : "Je suis seul face à moi-même et mon ordinateur".


Sébastien Guiné