La Verrière : Un espace pour développer la "culture d’entreprise"


Economie


1er avril 2022

Rencontre avec Valérie Ammirati dans le cadre de notre dossier sur le coworking à Nice

Valérie Ammirati est dirigeante du cabinet d’expertise comptable Skynet Expertise et Conseil à Nice. Elle est également fondatrice de l’espace de coworking La Verrière.

La Verrière a été créée en 2016, au sein de la résidence du Majestic à Cimiez. Face à la crise sanitaire, la sexagénaire n’a pas laissé tomber ses coworkers et son modèle d’affaires.

Pourquoi avez-vous décidé de faire du coworking ?

- On avait de l’espace et surtout, je voulais partager avec d’autres professions, qui soient complémentaires, pour apporter aux clients et faire des synergies pour eux. En même temps, j’avais monté des petits-déjeuners et des soirées dans des hôtels, avec les clients, pour les informer de tas de sujets qui ne relevaient pas de l’expertise-comptable.
Cela leur plaisait beaucoup et ils ne s’en allaient plus. Je me suis dit que les chefs d’entreprise étaient seuls et qu’ils avaient besoin de rompre cette solitude.

Qu’est-ce que cela apporte à vos équipes ?

- C’était une façon de leur expliquer, par l’exemple, ce qu’est un chef d’entreprise, parce que dans un cabinet comptable normal, vous entendez parler de dossiers.
Un client, c’est un être humain qui se bat pour que son entreprise vive et survive même, qui à chaque fois qu’il avance d’un pas, a des soucis et passe sa vie à résoudre des problèmes. Je voulais donc que mes équipes discutent avec eux en déjeunant, à la machine à café… et qu’elles prennent cette culture d’entreprise.

Et aux clients ?

- Quelques fois, ce sont les coworkers qui sont mes clients, mais ce n’est pas fait pour cela. Cela leur apporte une vision différente de l’expert-comptable.
Le client voit que l’on baigne dans un milieu d’entrepreneurs et il se rend compte que l’on a d’autres sujets de conversation que la comptabilité ou la fiscalité.

N’est-ce pas un moyen de se constituer un réseau ?

- Complètement. C’est la cerise sur le gâteau. Comme on fait des événements, on participe à des réseaux. Pendant des années, on a fait des petites matinales, des conférences sur les thèmes du droit et du chiffre. Il y avait des professionnels qui venaient et qui entre eux faisaient du réseau. On les croisait, on les voyait. On avait aussi les soirées Azur Pro Com’ où il y avait tout le monde de la communication qui arrivait et qui connaissait La Verrière, faisait parler de nous. Et puis nous, on allait écouter les conférences qui étaient vraiment intéressantes et on rencontrait un tas de gens. Donc oui, on se crée un réseau.

Avec le Covid, avez-vous pu continuer ?

- Oui, sans problème. Évidemment, pendant les confinements, nous avons été fermés, comme tout le monde. Au retour, on s’est rendus compte que les entrepreneurs souhaitaient revenir, qu’ils n’avaient pas du tout envie de rester chez eux. C’était vraiment la rupture de l’isolement qui comptait. On a même plus de coworkers depuis. Comme cela tourne, c’est compliqué à quantifier, mais on doit avoir une trentaine de coworkers sur trente-cinq (bureaux disponibles).

Les périodes de confinement, sans coworking, ont-elles impacté le cabinet ?

- Un petit peu parce qu’évidemment ce sont des ressources qui ne rentrent pas, puisque j’ai fait cadeau des loyers. Mais, tout de suite après, les gens sont revenus. Dès qu’il y a eu le deuxième confinement, on a mis en place des mesures où tout le monde n’était pas là en même temps.

Comment vos employés ont-ils réagi face aux confinements ?

- Nous avons fait très attention. Pendant le Covid, on a mis en place une communication multicanale interne. Je voyais tout le monde tous les jours. Le lundi midi du 17 mars 2020, on est partis chez nous. Le soir, on avait notre premier zoom tous ensemble. À partir du lendemain, j’avais mis en place des réunions par équipe, où tout le monde se voyait. On a mis nos apprentis les plus jeunes en chômage partiel parce qu’au niveau de leurs études, ils avaient beaucoup de choses à absorber, puis on les a faits rentrer progressivement.
On a vraiment laissé, à chacun, le temps de trouver son rythme. On a aussi une de nos collaboratrices, qui nous a proposé de monter un fil Slack, un fil de discussion, qui s’appelait Covid-19 et dans lequel il était interdit de parler boulot à la maison. On se parlait dessus, on s’envoyait des photos de nos gâteaux… et tous les vendredis soir à cinq heures, on faisait un Zoom avec toute l’équipe et on se racontait notre semaine. Comment on allait…

N’est-ce pas une forme de coworking à la maison ?

- Probablement. Mais ils sont quand même désireux de revenir travailler. Ils ne veulent pas du tout rester chez eux. Surtout les apprentis. Pour les autres, on a gardé un ou deux jours de télétravail. Mais on le faisait déjà. Ce n’était pas une nouveauté.

Au final, est-ce que votre façon de travailler a changé avec le Covid ?

- Je dirais que l’on était assez en avance. Je pense que cela a accentué la tendance au digital que l’on avait déjà prise. C’est-à-dire, de travailler à distance, de communiquer en visioconférence. Aujourd’hui, nos clients se déplacent moins et nous aussi. Au lieu de perdre une heure de trajet, quand on a un quart d’heure de choses à se dire, on se le dit en "visio". De la même façon, comme on a toujours des mesures sanitaires, on n’est jamais tous là, on fait nos réunions en mixte, avec des gens qui sont dans la salle de réunion et les autres sur Zoom.

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Audrey CREMER