Justice : Caméras et micros désormais autorisés lors de certains procès


Droit


8 avril 2022

Filmer un procès sera possible mais dans des conditions très précises. Le point.

Mesure très commentée de la loi portée par Éric Dupond-Moretti, l’enregistrement des audiences est désormais possible, sous conditions, depuis le 2 avril après la publication d’un décret.

Transparence et pédagogie

Le garde des Sceaux a « souhaité ouvrir les prétoires aux caméras dans un double souci de transparence et de pédagogie. L’objectif est simple et clair : faire rentrer la justice dans le salon des Français. Il ne s’agit pas de verser dans la justice spectacle. L’idée est de prendre les citoyens qui le souhaitent par la main pour les conduire dans la salle où se déroulent les procès, et montrer comment notre justice fonctionne ».

Eviter les « votre honneur »

« La transparence en matière de justice est la bienvenue  », a récemment souligné Jérôme Gavaudan sur RTL. « On peut donner acte au garde des Sceaux de son effort de vouloir rapprocher les Français de la justice, pour qu’ils ne considèrent pas, comme dans les séries américaines, que le président de l’audience (soit appelé) « votre honneur », qu’ils voient que l’avocat est au même plan que la personne mise en cause et que le procureur, lui, est sur une estrade ».

Oui, mais…

Le président du Conseil national des Barreaux (CNB) a toutefois relevé «  une des craintes que la profession d’avocat exprime  » : « Oui à la pédagogie, c’est nécessaire que les Français voient comment les choses se passent. Mais non à éloigner les Français de la salle d’audience. Nous pensons que la salle d’audience existe en elle-même et que l’image filmée ne rend pas forcément compte de ce qui se passe réellement à l’audience  ».

Ce que dit la loi

L’article 38 quater de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse, créé par l’article 1 de la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire, autorise «  l’enregistrement sonore ou audiovisuel d’une audience (…) pour un motif d’intérêt public d’ordre pédagogique, informatif, culturel ou scientifique, en vue de sa diffusion ».

Quelles audiences concernées ?

Jusqu’ici, les enregistrements sonores ou audiovisuels n’étaient autorisés que pour les procès exceptionnels et historiques. Il sera dorénavant possible de montrer le déroulement d’une audience de surendettement, d’expulsion, d’une audience devant un juge aux affaires familiales, devant un juge des enfants, ou encore aux Prudhommes.

Le cadre à respecter

« La diffusion devra respecter la présomption d’innocence, le droit à la vie privée et la sécurité des personnes concernées », a précisé le ministère de la Justice. La diffusion ne sera possible que lorsque l’affaire aura été définitivement jugée et toutes les personnes filmées, les professionnels comme les justiciables, devront donner leur consentement pour la diffusion de leur image.

A qui faire la demande ?

« La demande d’autorisation d’enregistrement et de diffusion est adressée au ministère de la Justice. (…) Elle est délivrée, après avis du ministre de la Justice, par le président de la juridiction concernant les juridictions administratives et les juridictions comprenant un magistrat du siège membre de la Cour de cassation, et par le premier président de la cour d’appel concernant les cours d’appel et les juridictions de l’ordre judiciaire de leur ressort », selon l’article 38 quater de la loi de 1881.

Une émission bientôt sur France 3

Le ministère de la Justice et France Télévisions ont signé une convention «  dans la perspective d’une émission régulière qui devrait débuter en septembre 2022 sur France 3. Cette émission permettra de montrer et d’expliquer concrètement comment fonctionne la justice en France. Les audiences diffusées seront systématiquement commentées par des professionnels de la justice  ».


Sébastien Guiné