Vidéosurveillance de l’attentat du 14 juillet : Mise en garde du Bâtonnier de Nice


Droit


12 septembre 2022

« On a un véritable risque de captation, qui peut se faire soit à Paris soit à l’Acropolis » de Nice où le procès est retransmis, avance Me Adrien Verrier. « C’est facile de capter des images pour qu’ensuite elles soient répercutées sur les réseaux sociaux et diffusées aux regards de jeunes mineurs ou de personnes particulièrement sensibles. Est-ce que le jeu en vaut la chandelle ? Est-ce que le principe de proportionnalité entre la volonté de comprendre le procès et le risque des conséquences que cela peut avoir pour certaines personnes le justifie ? Je n’en suis pas persuadé », ajoute le Bâtonnier du Barreau de Nice. « Il y a trois critères à prendre en compte » pour justifier selon lui le visionnage des images enregistrées par les caméras de vidéosurveillance le soir du 14 juillet 2016 sur la Promenade des Anglais. «  Premier critère : est-ce que c’est nécessaire à la compréhension du procès ? Deuxième critère : est-ce que c’est nécessaire pour juger les personnes qui sont accusées ? Et troisième critère : est-ce que c’est nécessaire par rapport aux parties civiles présentes ? ».
Pour l’avocat pénaliste, «  quand on regarde ces trois critères, on s’aperçoit qu’ils ne sont pas suffisamment remplis pour justifier que le visionnage puisse intervenir. Les accusés présents n’ont pas nécessairement un lien totalement direct, contrairement à ce que l’on peut en penser ou entendre, avec l’acte de terrorisme proprement dit, pour pouvoir les juger sur ces faits-là. Sur la compréhension du procès, je pense que les faits sont parfaitement clairs. Je peux comprendre que certaines parties civiles souhaitent visionner ces images mais les parties civiles elles-mêmes sont très divisées, entre elles et au sein des associations ».

« Des images très violentes »

Une décision quant à la diffusion des enregistrements doit être annoncée cette semaine par le président de la cour d’assises spéciale, Laurent Raviot.
Maître Verrier « pense qu’en définitive la cour d’assises va l’ordonner parce qu’elle n’a pas envie de manquer de transparence et d’être taxée d’opacité. Mais pour l’intérêt du dossier je pense qu’on aurait pu en faire l’économie car les images sont probablement insoutenables  ».
Ces derniers propos ont été confirmés vendredi par un enquêteur criminel venu témoigner dans la salle « grand procès » et qui a analysé les images de la vidéosurveillance à Nice. « Ce sont des images très violentes. Pour ceux qui vont se reconnaître, ou reconnaître leurs proches, c’est sûr que cela va être insoutenable. Cela ne va pas être supportable pour une partie de votre salle d’audience », a-t-il expliqué au président. Ce témoin pense néanmoins qu’il est « nécessaire que cette vidéo soit diffusée » pour se rendre compte «  de l’action et de la détermination  » de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel «  à écraser le plus possible de personnes ». « C’est terrifiant », a commenté le président Laurent Raviot à la vue de l’une des captures d’écran des enregistrements où l’on voit le camion à moins d’un mètre de dizaines de personnes ne le voyant pas arriver.


Sébastien Guiné