Nous voilà heureux d’être contents


Economie


6 octobre 2022

"Mon cher Vlad,
Après tout ce que tu fais pour nous et nos amis ukrainiens, tu me permettras de te tutoyer et d’utiliser ce diminutif qui, hasard des choses mais coïncidence peut-être pas si fortuite, évoque aussi celui du comte Dracula.
Donc, mon cher Vlad, merci de nous permettre de faire des économies d’énergie à grande échelle. Dans les chaumières de la France profonde nous rajoutons, comme les oignons, des couches de pulls pour ne pas allumer trop tôt un chauffage qui restera bloqué à 19 degrés au maximum cet hiver.
Grâce à toi, l’industrie déclinante du bonnet de nuit, qui tient chaud à la tête et conserve la chaleur du corps pendant le sommeil, connaît un coup de fouet appréciable. Comme pour les masques par temps de covid, le gouvernement fait ses calculs pour déterminer si les stocks français sont suffisants. Il faudra, c’est l’évidence, relocaliser la fabrication afin de ne pas dépendre de l’étranger pour un produit aussi stratégique.
Même euphorie chez les fabricants de bouillottes : on assiste à d’inquiétantes ruptures de stocks dans les grandes surfaces et devant la pénurie certains redescendent du grenier celles de leurs mamies. L’IA se met aussi de la partie avec de nouvelles bouillottes connectées qui prennent en compte la température corporelle, celle de la chambre et le dernier flash info de CNN sur la situation en Ukraine.
Pas en reste, les marchands de caleçons longs en flanelle se frottent les mains, comme ceux qui vendent des mitaines, des bonnets, des doudounes, des tricots de corps, des chaussettes en laine et des moon boots, dernier accessoire en vogue pour aller au bureau.
Mon cher Vlad, nous n’en attendions pas tant ! Merci de faire renaître l’industrie textile moribonde et l’artisanat du tricotage. Grâce à Bruno Le Maire, le Plan de relance du col à pull roulé est un succès et ce vêtement unisexe devient aussi rare dans les magasins que les pots de moutarde.
L’idéal serait, bien sûr, que tu balances quelques ogives nucléaires ici ou là (mais pas sur nous quand même !) comme le suggère ton bon copain Kadirov : cela permettrait de relancer la production des masques et des casques, de doper les ventes de pilules de sodium et de donner des sujets à traiter pour les chaînes d’information qui commencent à tourner en rond sur l’Ukraine.
Mon cher Vlad, j’oublie sûrement ici quelques-uns de tes bienfaits "collatéraux" à cette guerre. Tu le vois, on ne te sera jamais assez reconnaissant et l’on plaint ces ingrats d’Ukrainiens de ne pas apprécier à sa juste valeur une "libération" que tu leur apportes sur un plateau d’argent. Faire le bonheur des gens malgré eux est une entreprise si difficile...
Bon courage, ne te laisse pas intoxiquer par ces moins que rien qui ne jurent que par la paix. Le comte Dracula se joint à moi pour t’embrasser, à la russe, sur la bouche".


Jean-Michel Chevalier