On y va en klaxonnant !


Economie


4 novembre 2022

L’edito hebdo de Jean-Michel Chevalier

En parcourant la liste des 83 communes des Alpes-Maritimes où les équipements "neige" sont obligatoires depuis ce 1er novembre, en voyant se profiler les ZFE (zones à faible émission) qui privent les voitures anciennes de circuler dans onze agglomérations françaises (et bientôt vingt-trois), je ne sais pas pourquoi je me suis mis à penser au fin lettré qu’était Georges Pompidou.
Cet agrégé de lettres classiques avait le verbe précis et élégant. Ce qui ne l’a pas empêché de dire au tout jeune Jacques Chirac qui lui présentait un énorme tas de décrets à signer : "Arrêtez d’emmerder les Français ! Il y a trop de lois dans ce pays, on en crève, laissez-les vivre, et vous verrez ça ira beaucoup mieux."
Nous n’avons hélas pas suivi le précieux conseil du Président aux gros sourcils.
Pourtant, tout était dit, et à l’époque il n’y avait pas encore le réchauffement climatique, l’inflation des produits alimentaires, les prix des carburants et du chauffage, la guerre en Ukraine, j’en oublie...
Même pour de bonnes raisons comme la santé et la sécurité routière, il faut se souvenir qu’une petite goutte peut faire déborder un vase plein de colère dans un pays comme le nôtre toujours prompt à s’enflammer. L’heure est suffisamment pénible pour ne pas en rajouter...

Sans doute vous est-il arrivé comme à moi de rentrer rincé à la maison et de n’avoir envie ni de ressortir pour dîner au restaurant, ni d’aller au cinéma, ni de lire ou d’écouter un disque... L’autre soir, je restais donc "tranquillou" sur mon canapé, la télécommande de la télé à la main, faisant défiler les programmes. J’ai trouvé ce qu’il me fallait : un vrai "nanar", pas prise de tête et finalement assez drôle grâce à la truculence des acteurs (Blier, Lefèvre et Serrault) qui en faisaient des tonnes sur un scénario indigent (percer le coffre fort de la RATP en passant par des toilettes publiques surveillées par une dame-pipi revêche).
Ce qui m’a marqué dans ce navet interstellaire intitulé "Ce n’est pas parce qu’on n’a rien à dire qu’il faut fermer sa gueule", ce sont quelques scènes de rues tournées en ’live’ dans les années 75. On y voyait des taxis très ordinaires (du genre 404 essoufflée ou Renault 12, voiture du Français moyen), des gens qui fumaient dans les espaces publics, une absence totale de vidéosurveillance mais un bon vieux gardien de la paix en chair et en os, des cabines téléphoniques à pièces, des gens qui se parlaient et rigolaient sans regarder comme des zombies l’écran de leurs smartphones, des gamins marchant et jouant dans Paris sans être accompagnés. Une impression de légèreté, de cette liberté insidieusement grignotée au nom de la sécurité et du ’progrès’. Aussi bizarre que cela puisse paraître, nous étions bien sur la planète Terre, en France, et les gens au mode de vie plus simple que l’actuel n’avaient pas l’air plus malheureux...


Jean-Michel Chevalier