Tohu-bohu au bahut


Politique


13 avril 2023

Il fut un temps que les plus de cinquante ans ont connu : celui des chahuts collectifs en classe sanctionnés d’une punition collective... à faire individuellement. Elle variait de 200 lignes (les profs les plus pervers demandaient de recopier le Gaffiot de telle page à telle page, expérience vécue par l’auteur) jusqu’à la colle de quatre heures le samedi après-midi. Il ne serait venu à l’idée d’aucun parent de contester un week-end écourté, et encore moins à la victime de se plaindre d’une "erreur judiciaire" les ayant conduits à une sanction définitive non susceptible d’appel.

Nos députés, eux, ont été tellement dissipés - le mot est faible - ces dernières semaines avec la réforme des retraites que la présidente de l’Assemblée s’érigeant en surveillante générale leur a passé une volée de bois vert dans une missive dont le contenu a fuité dans la presse. "Les premiers mois de la législature ont, à l’évidence, été marqués par de graves dysfonctionnements individuels ou collectifs (...) et par une inquiétante dégradation de la sérénité et de la qualité de nos échanges" leur écrit Yaël Braun-Pivet. Elle rappelle que les débats (si on peut les appeler ainsi) ont donné lieu à des "comportements inacceptables ou inappropriés". Le bureau de l’Assemblée à sanctionné 77 députés, dont 68 Insoumis qui portent bien leur nom.

On pourrait sourire à la vue de ce tohu-bohu justifiant pleinement la distribution de bonnets d’âne si ce spectacle, affligeant, ne venait s’ajouter à l’effet grossissant de la télévision. Les chaînes aiment le buzz et choisissent les extraits les plus "croustillants" où l’on voit des claquements de pupitres, des cris de maquignons, des micros tordus sous le coup de la colère, dans ce qui devrait être un temple de la raison où les représentants de la Nation votent les lois pour le bienfait de tous.
Cette classe politique turbulente et réfractaire est à l’image du pays. Mais l’on attend mieux d’elle, sinon dans les résultats, du moins dans les comportements de gens élus, en principe les meilleurs choisis parmi nous tous. Notre démocratie parlementaire n’est pas en si bon état qu’elle peut se permettre de donner d’aussi piteux exemples de "bordélisation" et il est à craindre que les postures observées ces dernières semaines ne viennent à convaincre encore davantage de Français d’aller à la pêche le jour des élections…

Certains députés se sont affranchis des règles de l’Assemblée en divulguant sur les réseaux sociaux les échanges à huis clos de la commission mixte paritaire. D’autres ont brandi des pancartes dans l’Hémicycle comme dans une manif de rue. "Autoritarisme" dénoncent des vertus outragées, qui font mine de s’indigner après cette remontée de bretelles de la présidente de l’Assemblée.

Le mauvais exemple est aussi venu du banc des ministres où le garde des Sceaux s’est laissé aller à des bras d’honneur en direction d’un opposant qui est, quand même, un élu de la République…

Les temps sont difficiles. Il est indispensable d’en revenir à plus de sérénité et de dignité.


Jean-Michel Chevalier