En crise, l’artisanat du bâtiment se mobilise


Economie


12 septembre 2013

Les artisans du bâtiment annoncent une nouvelle manifestation, le 13 septembre. Après la chute de l’activité qui s’est poursuivie pendant le deuxième trimestre 2013, la Capeb entend protester contre la politique du gouvernement, jugée contre- productive.

Au deuxième trimestre 2013, l’activité des artisans du bâtiment a diminué de 4% en volume. C’est le cinquième trimestre consécutif de baisse. C’est ce qu’a annoncé la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), lors d’une conférence de presse, le 4 septembre à Paris. La chute est particulièrement marquée dans le secteur de la construction neuve, avec un recul de 7,5%. L’activité dans le domaine de l’entretien-rénovation, elle, diminue de 2%. Même le secteur de la performance énergétique, qui tirait jusqu’alors son épingle du jeu, affiche un taux de croissance nul. L’ensemble du territoire est touché par cette baisse de régime. Si certaines régions connaissent un frémissement de l’activité, elles partent de très bas. C’est notamment le cas de l’Ile-de-France et de l’Est qui voient augmenter leurs commandes et leur activité. Le climat n’a pas contribué à améliorer la situation : avec le mauvais temps, l’activité a été ralentie jusqu’à la fin du mois de juin. Résultat, « nous allons atteindre les chiffres d’activité des années 99, 2000. Nos activités vont en reculant », alerte Patrick Liebus.

Disparitions d’entreprises

Les incidences de cette baisse de l’activité se déclinent sur tous les plans pour les entreprises. Au premier trimestre 2013, la Coface a enregistré plus de 9 000 cessations d’entreprises dans le bâtiment, un chiffre qui a augmenté de 3,4%. Et la Capeb prévoit que les conséquences de la crise sur les défaillances d’entreprises et la destruction d’emplois ne vont faire qu’empirer. Pour l’instant, parmi les entreprises qui résistent, nombre rencontrent des problèmes de trésorerie. « 38% des entreprises artisanales se trouvent en difficulté », alerte Patrick Liebus. D’après la Capeb, les besoins s’élèvent à 24 000 euros, contre 22 000 euros, le trimestre précédent. Patrick Liébus pointe la responsabilité des banques qui n’accompagnent pas les entreprises et des clients particuliers qui paient leurs factures très en retard. « Les communes respectent les délais de paiement », reconnaît en revanche le responsable. Les carnets de commandes des artisans ne vont pas plus loin que trois mois. « Cela a très légèrement augmenté, mais c’est aussi parce qu’il y a eu des intempéries, donc des travaux ont été reculés », analyse Patrick Liebus.

Politique de gribouille ?

Au-delà des intempéries climatiques, pour la Capeb, toute une série de décisions – ou indécisions- politiques du gouvernement Hollande, expliquent les difficultés rencontrées par les artisans du bâtiment. Parmi les doléances de l’organisation professionnelle figure en bonne place l’encadrement d’une concurrence jugée déloyale. Dans le bras de fer qui, depuis plusieurs mois, oppose artisans du bâtiment et auto-entrepreneurs, la Capeb n’a pas obtenu l’exclusion de ces derniers du secteur du bâtiment. Or, « si le régime des auto-entrepreneurs convient dans certaines activités, par contre, dans le secteur qui est le nôtre, ce régime pose un réel problème », insiste Patrick Liebus, qui évoque travail dissimulé et différentiel d’obligations entre les deux régimes. Sur un sujet ponctuel, toutefois, un équilibre est apporté par le projet de loi porté par la ministre de l’Artisanat, Sylvia Pinel : dorénavant, les auto-entrepreneurs ne bénéficieront plus des mêmes droits à la formation continue que les artisans, lorsqu’ils ne cotisent pas. Outre les auto-entrepreneurs, la Capeb se plaint de la concurrence des « entreprises low cost qui ne respectent aucune règle fiscale et sociale. Elles travaillent en sous-traitance avec les grandes entreprises du bâtiment. Rien n’a été fait. Cela continue », dénonce Patrick Liebus, citant l’exemple de salariés non déclarés qui ont été découverts sur le chantier de l’EPR de Flamanville.

Autre catégorie de doléances : les fluctuations du cadre fiscal, avec l’augmentation du taux de TVA, la réforme prévue sur les retraites, la remise en cause de la défiscalisation des heures supplémentaires… Plus spécifiquement, la Capeb pointe aussi le retard dans la mise en place des mesures qui concernent directement le bâtiment, notamment celles liées au Grenelle de l’environnement. « Rien n’est fait pour que l’on puisse travailler », grogne Patrick Liebus.

Mobilisation en vue

Après la manifestation de janvier dernier, pour laquelle la Capeb revendique 10 000 participants, l’organisation a donc décidé d’une nouvelle mobilisation sur tout le territoire, le 13 septembre. La Confédération revendique le soutien d’autres organisations, comme certaines branches de l’UPA (Union professionnelle artisanale), la Fédération des retraités du secteur du bâtiment, ou encore la Fédération française du négoce. Parmi ses revendications figurent notamment une TVA réduite à 5% pour l’ensemble des travaux de rénovation, la réouverture du PTZ+ (prêt à taux 0) à l’ancien, sous conditions de travaux de performance énergétique réalisés dans les deux ans suivant l’acquisition, le rétablissement à 45 000 euros du plafond de ressources du cumul de l’Eco-prêt et du Crédit d’impôt développement durable, la création du PERL, le « Prêt énergie pour la rénovation des logements », l’adaptation des modalités d’intervention de la BPI (Banque publique d’investissement) aux TPE, notamment aux entreprises de moins de 20 salariés, en matière de préfinancement du Crédit d’impôt compétitivité emploi et de la garantie d’Oséo-BPI faite aux banques lorsqu’elles accordent un préfinancement du CICE.


Anne DAUBREE