Cessions d’entreprises : les nouvelles obligations sociales


Droit


28 octobre 2014

La loi relative à l’économie sociale et solidaire (ESS) du 31 juillet 2014 instaure un droit d’information préalable des salariés, en cas de projet de cession de leur entreprise. La mesure doit entrer en vigueur ce 1er novembre.

Désormais, dans les entreprises de moins de 250 salariés, les employeurs devront informer leurs salariés en cas de cession du fonds de commerce de l’entreprise qui les emploie (article L. 141-23 et s du Code de commerce), comme en cas de cession de parts ou d’actions donnant accès à la majorité du capital social de cette même entreprise (article L. 239-6 et s du Code de commerce).
L’objectif clairement affiché du législateur est de favoriser les reprises d’entreprise par leurs salariés. Pour le gouvernement, cette possibilité donnée aux salariés de présenter un projet de reprise peut « ainsi éviter la disparition de nombreux emplois ». Cette information devra être réalisée au plus tard deux mois avant la cession. Elle portera sur l’existence d’une volonté de cession du fonds de commerce ou de la majorité du capital de l’entreprise ainsi que sur la faculté pour tout salarié de cette dernière de faire une offre de rachat. Dans les entreprises de 50 à 249 salariés, le comité d’entreprise (CE) sera informé simultanément avec les salariés.

Les salariés et les membres du CE seront soumis à une obligation de « discrétion » et pourront ainsi proposer une offre de rachat du fonds de commerce, des parts sociales, actions ou valeurs mobilières, ou une offre de reprise de l’entreprise sous la forme juridique qu’ils souhaitent.

Des exceptions

Toutefois, certaines situations de cessions sont exclues de ce formalisme :
- les transmissions réalisées dans le cadre d’une succession, d’une liquidation du régime matrimonial ou d’une cession du fonds au conjoint, à un ascendant ou descendant,
- les entreprises en cours de procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.
La cession en projet peut être réalisée entre deux mois et deux ans après l’information des salariés. Au terme des deux ans, tout nouveau projet de cession devra de nouveau être notifié aux salariés.

La cession pourra intervenir avant l’expiration du délai de deux mois si chaque salarié a fait connaître au cédant sa décision de ne pas présenter d’offre. Le défaut de respect de ces obligations pourra entraîner l’annulation de la cession, à la demande de tout salarié, dans les deux mois suivant la réalisation de la cession.
Enfin, les employeurs devront informer leurs salariés, au moins une fois tous les trois ans, des règles qui régissent la reprise d’une société par les salariés. L’information devra porter, en particulier, sur les conditions juridiques de la reprise d’une entreprise par les salariés, sur ses avantages et ses difficultés, ainsi que sur les dispositifs d’aide dont ils peuvent bénéficier.

Pour entrer en vigueur, cette disposition nécessite un décret d’application définissant le contenu et les modalités de cette information et prenant en compte la taille des entreprises concernées.

Attention ! Ce droit d’information des salariés s’applique aux cessions conclues trois mois au moins après la date de publication de la loi c’est-à-dire aux cessions conclues à compter du 1er novembre.

L’autre sujet qui fâche le patronat

Comme pour le compte pénibilité, les organisations patronales montent au créneau pour réclamer l’abrogation des articles 19 et 20 de la loi Hamon sur l’ESS relatifs aux cessions d’entreprise. Elles dénoncent, notamment, la complexité de leur mise en œuvre car « ne tenant pas compte de la diversité des situations économiques ». Un dispositif jugé « anxiogène et contre-productif ». « Pour rassurer les chefs d’entreprise », les décrets d’application doivent d’ailleurs être accompagnés d’un « mode d’emploi », consultable sur le site de Bercy. « Toutes les étapes de la procédure y seront détaillées », précise la secrétaire d’Etat chargée du Commerce, de l’Artisanat, de la Consommation et de l’ESS, Carole Delga, dans un entretien au quotidien Les Echos, ce 27 octobre.

B.L


François TAQUET, avocat, conseil en droit social