Comment la France peut tirer profit de la révolution numérique


Economie


27 novembre 2014

La transformation numérique représente une opportunité pour la France, d’après le rapport remis à la secrétaire d’Etat chargée du numérique. Malgré certaines faiblesses, le pays dispose des atouts nécessaires. A condition de réagir, et de se saisir de l’échelon européen.

Suivre un « principe d’audace ».

C’est le fil rouge du rapport « La nouvelle grammaire du succès : la transformation numérique de l’économie française », remis à Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat chargée du Numérique et à Marylise Lebranchu, ministre de la Décentralisation et de la Fonction publique, ce 7 novembre à Bercy par Philippe Lemoine, président de la FING, Fondation Internet nouvelle génération. Le document qui comporte 180 propositions, dont neuf projets qui peuvent être immédiatement réalisés, comme par exemple, un système d’innovation ouverte sur les maladies chroniques, au service de l’amélioration et du suivi des patients et de la médecine prédictive.

Avant tout, le rapporteur souligne l’ambivalence de la révolution numérique
. A la base, le constat ne peut que susciter le consensus : la transformation numérique de l’économie est en cours, inéluctable. Elle bouleverse différents paramètres, avec les processus d’automatisation, la dématérialisation, la modification des chaînes d’intermédiation, l’importance prise par les data…. « Aujourd’hui, l’acteur dominant, c’est l’individu. Ce ne sont pas les entreprises qui inventent, ce sont les personnes, et les entreprises doivent s’y adapter », souligne Philippe Lemoine. Autre constat, réalisé par une enquête américaine : parmi les entreprises qui s’équipent technologiquement, seules celles qui modifient aussi leur manière de travailler accroissent leur niveau de rentabilité. Car le numérique est aussi source de nouvelles complexités. En termes d’emploi, les impacts sont énormes : d’après le MIT( Massachusetts institute of technology), 47% des emplois américains vont disparaître ou être profondément transformés par le numérique. Pour l’Europe, à en suivre le think tank Bruegel, c’est pire encore : l’impact du numérique pourrait se porter sur 54% des emplois européens.

L’échelle européenne demeure primordiale

Malgré tout, pour Philippe Lemoine, la transformation de l’économie liée au numérique représente « plus une opportunité qu’un risque », car la France dispose de certains atouts pour la tourner à son avantage. En premier lieu, l’appropriation plutôt large des technologies par les Français, mais aussi l’existence d’un nombre significatif de startups très « prometteuses », ainsi que l’émergence d’entreprises positionnées sur la transition numérique pour le B to B. D’autres réalités poussent moins à l’optimisme : les PME hexagonales sont, de façon générale, trop peu investies dans le numérique. Exemple : « Seulement 11% de ces entreprises ont vendu au moins une fois sur Internet », regrette Philippe Lemoine. Et le taux de croissance de la publicité en ligne en France n’est que de 3%, contre 12% au Royaume-Uni, où ce marché est pourtant déjà beaucoup plus développé.

Autre difficulté, grandes entreprises et administrations, des acteurs structurants de l’économie française, peinent à s’adapter.

Certes, des exemples d’excellence existent, mais « globalement, la masse critique n’y est pas », regrette Philippe Lemoine. Et pourtant, les enjeux relèvent directement de la survie de ces entreprises. Exemple, avec les Google, Apple et autres géants de l’Internet et du numérique, qui imposent leur intermédiation, « il existe un risque très important de pompage de la marge des entreprises traditionnelles », met en garde Philippe Lemoine. Par ailleurs, souligne le rapporteur, l’échelle européenne est essentielle pour traiter ces sujets de manière efficace, qu’il s’agisse de fiscalité, de droit de la concurrence, du droit d’auteur…
Pour Axelle Lemaire aussi, l’échelle européenne est cruciale, et, bonne nouvelle, la secrétaire d’Etat au Numérique constate un « réveil » à ce niveau, après une quinzaine d’années « où les gouvernements ont laissé le champ libre aux opérateurs télécoms ».


Anne DAUBREE