Le Père Noël aura-t-il (les moyens) de nouveaux radars dans sa hotte ?


Droit


5 décembre 2014

Nos sénateurs ont décidé le 29 novembre, lors de l’examen du budget 2015, de réduire le parc d’installation de radars cinémomètres de moitié, alors qu’au pied du sapin était promis 40 radars « tronçon » (ou vitesse moyenne), 43 radars « chantiers », sans parler du remplacement de près de 130 « vieux » radars fixes et du même nombre d’obsolètes radars mobiles. Triste Noël pour M. le Premier Ministre.

Heureusement, les députés rétabliront sans doute la perspective, mais il n’en reste pas moins que la crise frappe, là aussi, à la porte.

L’économie du radar repose sur une bien curieuse logique pour ce parc qui comptera pas moins de 4200 machines en 2015.

Le coût d’investissement, -sachant qu’un radar chantier vaut par exemple 200.000 euros la pièce-, et d’entretien, - sachant qu’il est, pour un radar fixe, de 15.564 euros l’an en moyenne-, se doit d’être couvert par… l’infractionnisme routier ! et ne parlons pas du financement du recouvrement, ni même du jugement des causes… Or, la rentabilité du radar dépend, notamment et principalement, du « goût » pour l’infraction des conducteurs et, bien entendu, de leur solvabilité. Étant entendu que ces systèmes sont mis en place pour faire baisser et disparaître les infractions qui les nourrissent… ils scient la branche sur laquelle ils se tiennent.

Jusqu’à ce jour, comme dans beaucoup d’autres domaines, nul n’envisageait que la course en avant puisse jamais s’arrêter : Plus de radars, plus d’infractions, plus d’argent, etc., cette farandole demeurait l’horizon à la fois détesté de tous et condition nécessaire de l’existence des outils de la répression.

Pourtant, imaginons, puisque Noël arrive, que le nombre de verbalisations baisse, peut-être même parce que les conducteurs roulent au-dessous des limitations, qu’ils sont moins nombreux sur les routes, qu’ils n’aient plus les moyens de payer leurs amendes… qu’adviendrait-il d’une politique enthousiaste en matière de radar ? un drame financier d’envergure biblique ?

Lorsque l’on vit sans limite tangible dans les moyens, n’en vient-on pas à oublier que ce sont les moyens qui dictent la réalisation ? Pour implanter des radars il faut des moyens, pour faire et assumer des infractions routières aussi ; et qu’ils manquent pour les unes, ils manqueront pour les autres. Les radars élimineraient les infractions, lesquelles, en diminuant, élimineront les radars.

Le Sénat serait-il assez sage pour voir qu’il serait utile de freiner avant le grand choc ?
Quels radars pour 2015 ? On en débat ; vivement Noël où nous saurons ce que, dans nos petits souliers, les lutins du Père Noël de la sécurité routière voudront bien déposer. Et laissons à M. le Premier Ministre la souffrance de sa prière : plus de radars et moins d’infractions…


Xavier MORIN, Docteur en Droit, Avocat au Barreau de (...)