Tony au bûcher


Billet du jour


27 juillet 2010

Dans l’authentique cataclysme de la marée noire du Golfe du Mexique, la firme BP semble, pour la première fois, avoir repris le contrôle de… la communication. Entendons par là que les médias ont cessé de relever les approximations lénifiantes, les mensonges délibérés et les photos truquées, autant de propagande grossière dont la société a usé et abusé pour tenter de minimiser les conséquences de l’accident. Maintenant que les fuites, nous dit-on, ont été pampérisées, après plusieurs mois d’incontinence dévastatrice, la firme reprend la main en ouvrant une nouvelle fuite : celle concernant le « limogeage » de son Président, le désormais célèbre Tony Hayward, qui s’était jusqu’à maintenant singularisé par une morgue, un cynisme et un dilettantisme qui ont exaspéré l’opinion mondiale. La bonne vieille méthode du bouc-émissaire n’a rien perdu de son efficacité. Même le Monde.fr, dans son éditorial d’hier, relevait que la mise à l’écart de Hayward marquait « la fin de l’ère de l’impunité pour les patrons de multinationale ». Le raccourci est plutôt ambitieux et ne valorise pas vraiment l’analyse de l’éditorialiste.

Aux temps anciens, on conduisait les sorcières au bûcher, bien qu’elles ne fussent pas plus responsables des calamités que ne l’est Tony Hayward. Si BP tarde autant à annoncer le départ de son Président, c’est que ce dernier négocie âprement la qualité du bois qui le fera flamber. Des essences précieuses, assurément, ce qui est bien naturel pour quelqu’un qui a fait toute sa carrière dans l’industrie pétrolière. A en croire la rumeur, la « fin de l’impunité » de Tony se soldera par le versement des indemnités qui lui sont dues aux termes de son contrat. Plus une retraite-chapeau qui lui permettra de panser confortablement ses blessures. Et aussi, probablement, un joli paquet d’actions BP qui l’aidera à calmer la douleur de ne pouvoir exercer efficacement ses stock-options, du fait de la chute de la valeur du titre. Il est permis de supposer que d’innombrables délinquants rêveraient d’une sanction aussi assassine. En revanche, l’histoire ne dit pas (encore) le prix réel à payer par le Président de BP pour sa déchéance. Qu’il nous soit permis de le révéler ici en exclusivité : Hayward ne pourra prétendre à l’anoblissement par la Reine d’Angleterre. Ni ses enfants jusqu’à la troisième génération. Pour les patrons de multinationale, l’époque est devenue vraiment barbare.

La recette du jour

La cuisine des restes

En temps de crise, il convient de serrer le budget. Pour vos réceptions, imposez à votre cuisinier l’utilisation de restes frelatés et de denrées périmées. Si parmi vos invités certains se retrouvent à l’hôpital, commencez par laissez accroire qu’ils étaient malades avant de venir chez vous. Puis qu’ils étaient trop vieux pour supporter un dîner. Ensuite que la maladie est un risque naturel. Enfin, séparez-vous de votre Chef dans la discrétion médiatisée. Et pistonnez-le pour le faire entrer à Buckingham Palace.


Jean-Jacques Jugie