Les TPE peinent à se raccrocher aux prémices de la reprise économique


Economie


6 mai 2015

Conjoncture - La reprise économique se fait attendre pour les TPE. Pour elles, l’année 2014 a été mauvaise, marquée par une chute de l’activité de 3,2%. Et si 2015 devrait connaître une amélioration, celle-ci ne va pas jusqu’à renouer avec la croissance, d’après l’Observatoire de la petite entreprise.

En 2014, l’activité des très petites entreprises (TPE) a chuté de 3,2%.

« On constate une forte dégradation de l’activité. Quasiment tous les voyants sont au rouge », annonce Yves Marmont, président de la FCGA, Fédération des centres de gestion agréés, qui regroupe, via ses 100 centres, 300 000 entreprises du commerce et de l’artisanat de moins de 10 salariés. C’était le 27 avril, lors de la conférence de présentation des résultats de l’étude sur l’activité des TPE en 2014, de l’Observatoire de la petite entreprise, réalisé par la FCGA en partenariat avec le groupe Banque Populaire. Cette année, par rapport à 2013, où l’activité avait diminué de 0,1%, « la dégradation est significative », ajoute Yves Marmont. A l’origine de cette évolution, plusieurs dynamiques impactent de manières différentes les divers secteurs, de la baisse du pouvoir d’achat, et les arbitrages qu’il engendre en matière de dépenses, aux mesures fiscales ou à l’évolution de la règlementation. Ainsi, en dépit de la baisse globale de l’activité, sur les 12 secteurs examinés, cinq améliorent relativement leur performance par rapport à l’année précédente.

Les fromagers se portent bien, le bâtiment s’écroule

Le commerce de détail résiste, qui connaît une évolution de 0,2%, toutefois inférieure aux 1,4% de 2013. L’alimentaire et la santé s’en sortent plutôt mieux que les autres. Au sein du commerce alimentaire, certains produits spécifiques qui proposent une offre de qualité tirent même plutôt bien leur épingle du jeu, à l’image de la fromagerie-crémerie et de la charcuterie artisanale qui affichent des taux de croissance de l’ordre de 2%. De fait, sur le podium des professions qui s’en sortent le mieux, l’alimentaire monopolise deux places sur trois.

En revanche, du coté des secteurs qui souffrent, l’artisanat du bâtiment se place en tête : son activité chute de 7,6%, après la baisse de 1,6% de l’année précédente. « Le bâtiment n’avait jamais connu un tel recul, même par rapport à 2008 », alerte Yves Marmont. Les agences immobilières connaissent elles aussi un recul notable de leur activité, de 9,4% contre 1,5% en 2013. « Les petites agences indépendantes sont celles qui ont le plus souffert », précise l’expert. Et c’est pire encore chez les entrepreneurs du carrelage et de la faïence : ils ont vu chuter leur activité de 12,1%.

Pour les activités liées à l’immobilier, commente Yves Marmont, c’est bien un effet « yoyo » lié à l’évolution des incitations fiscales qui compte, plus que l’évolution de l’activité économique ou le pouvoir d’achat des ménages. L’activité des services baisse de 3,7%, une tendance comparable à celle de l’année précédente. Quant aux studios photo, ils connaissent une baisse importante ( 8,9%) de leur activité, suivant une tendance déjà marquée depuis plusieurs années : ils sont victimes de l’évolution des usages et de la baisse des prix des appareils, de plus en plus accessibles pour les particuliers. Résultat « inattendu » pour Yves Marmont, la parfumerie connaît une croissance positive non négligeable ( 2,3%), malgré la concurrence des parapharmacies. « Il est difficile de donner une explication purement économique », estime l’expert. Autre secteur qui connait une évolution enviable, celui des cycles et des scooters. Reste que ces activités ne sont pas susceptibles d’engendrer un effet d’entraînement sur le reste de l’économie, comme pourrait le faire le bâtiment.

Une fragile inversion de tendance

Après cette année 2014 négative, les premières tendances de 2015 observées par l’Observatoire des petites entreprises demeurent mesurées et ses projections pour l’ensemble de l’année, très prudentes. « Si l’activité des TPE est à l’équilibre à la fin de l’année, ce sera déjà bien », avance Yves Marmont. En effet, les frémissements constatés au niveau macroéconomique liés à la baisse de l’euro, à la diminution du prix du pétrole et à la politique monétaire européenne ne se concrétisent pas encore par un regain d’activité au niveau des TPE. « Ce qui pourrait jouer, c’est la reprise de confiance des ménages. Mais les gens sont très prudents », ajoute Yves Marmont.

Pour rappel, d’après l’étude du cabinet Altarès, publiée le 16 avril, le nombre de défaillances d’entreprises en France a augmenté de 7,6% sur un an ce premier trimestre, avec 18 134 entreprises concernées. Parmi elles, les TPE se sont révélées particulièrement fragiles. Les défaillances d’entreprises qui comptent un seul salarié ont augmenté de 54% et celles de deux salariés, de 8%...

Note positive, toutefois, « on remarque une reprise de l’investissement dans les TPE. Les chefs d’entreprise ont déjà plus confiance et anticipent une reprise de l’activité. Nous avons une demande de prêts en équipement en hausse de 11% depuis le début de l’année », explique Michel Roux, directeur du développement Banque Populaire chez BPCE. Le montant moyen des prêts demandés s’élève à 15 000 euros environ et ils concernent essentiellement les aménagements de magasin dans le commerce de détail. En revanche, le secteur du bâtiment n’est pas concerné.
Toutefois, en 2015, d’après les projections d’activité tracées par l’Observatoire des petites entreprises, ce dernier secteur devrait connaitre une amélioration relative de sa situation. Les mesures de relance, comme la simplification des normes de construction et les aides prévues dans le cadre de la transition énergétique devraient produire des effets positifs dans la seconde partie de l’année. Reste que les projections sur l’année demeurent négatives sur toutes les professions ( couverture : -0,8, menuiserie : -2%). Dans l’équipement de la maison et de la personne, de nombreuses professions pourraient devoir faire face à des évolutions d’activité qui tournent entre 0 et -2%, qu’il s’agisse de l’électroménager TV, de la chaussure ou de la lingerie, ou encore de l’horlogerie- bijouterie. Même dynamique dans les autres domaines… Aucune trace d’évolution franchement positive.

Pour la FCGA, au mieux, après une mauvaise année 2014, 2015 pourrait être l’année de l’inversion de l’évolution. « Les voyants sont moins rouges que l’an dernier. Mais il faut le temps. Il reste le problème du nombre de chômeurs et les autres font attention. En France, en période de crise, on thésaurise », rappelle Yves Marmont.


Anne DAUBREE